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l’hygiène publique, à l’organisation du travail, aux assurances contre les accidents et la maladie, aux mutualités, aux retraites de la vieillesse; elle a donné aux ouvriers la liberté de se syndiquer pour la défense de leurs intérêts corporatifs ; elle a multiplié les établissements d’instruction technique, les écoles d’apprentissage, les écoles d’agriculture ; elle s’est efforcée d’accroître les énergies du pays, d’augmenter la production, de procurer à la population la plus grande somme possible de bien-être, de donner à tous les Français la sécurité du jour et du lendemain. Je ne dis point certes que, dans une entreprise aussi vaste et aussi complexe, des fautes n’aient pas été commises. Quelques-unes ont pu être inspirées par cet esprit de parti qui, dans l’apparente tranquillité de l’Europe, a eu parfois en France des réveils un peu turbulents. D’autres sont venues d’expériences maladroites ou de timidités excessives. Ce n’est ni le moment ni le lieu de dresser le bilan de ces erreurs. Il suffit que, dans l’ensemble, et déduction faite d’un passif dû surtout à la faiblesse humaine, il reste, après cinquante ans, à l’actif de la France, un total d’améliorations intérieures dont, à l’étranger, nos plus violents détracteurs n’osent plus nier l’importance.

En même temps que se poursuivait cette réorganisation nationale, la République, dont, il convient de le proclamer, la politique extérieure a été constamment aidée par le patriotisme de tous les partis, jugea qu’après les cruelles épreuves de l’invasion et du démembrement, notre pays avait un impérieux besoin de calme, de réserve et de recueillement. Elle veilla, dès le début, à le garder de toute aventure, à lui interdire toute imprudence, à convaincre le monde entier de la sincérité de nos intentions pacifiques. Mais elle comprit, en même temps, que pour maintenir In paix, il ne lui suffisait pas de la vouloir. Dès 1875, l’Allemagne, que sa victoire avait exaltée, mais non assouvie, nous avait brusquement provoqués. Stupéfaite et irritée de la fidélité que l’Alsace et la Lorraine gardaient à la France, elle ne se bornait pas à molester les habitants des provinces annexées ; elle nous accusait de préparer une revanche et de ne pas accepter avec assez de résignation le fait accompli. Elle imaginait prétextes sur prétextes pour nous chercher querelle et affectait même de prendre ombrage des précautions militaires que nous imposait son attitude toujours menaçante. Dans la seule pensée de protéger notre indépendance, nous avions reconstitué notre armée et notre flotte, bien que nos forces maritimes et terrestres fussent toujours sensiblement inférieures à celles de l’Allemagne, nous ne pouvions jamais les accroître sans que