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MONSIEUR LE COMMISSAIRE GÉNÉRAL,

MONSIEUR LE GÉNÉRAL, GOUVERNEUR DE STRASBOURG,

MESDAMES ET MESSIEURS,


Si nous sommes réunis dans cette solennité et si nous allons pouvoir parler du Rhin avec une fière liberté, c’est une des innombrables conséquences de la fidélité alsacienne et puis du génie et des sacrifices de nos armées. Aussi je vous demande que nous placions ces leçons sous l’invocation des fils de France qui sont tombés pour la délivrance, et je salue, en les nommant dans mon cœur, celles de leurs familles en deuil que je reconnais dans la salle.

Parmi ces morts, qu’il me soit permis de placer celui dont le souvenir me vaut pour une large part votre sympathie, le poète-patriote qui dévoua totalement sa vie à la préparation morale des âmes à la guerre et qui ne voulut être qu’un sonneur de clairon pour sonner et sonner sans trêve le ralliement des Français autour de Metz et de Strasbourg, jusqu’à ce que le souffle lui manquât, au matin même de la Revanche qu’il avait prophétisée, et comme au seuil de la terre promise.

Le Génie du Rhin. Ce n’est pas de politique que j’ai sollicité l’honneur de parler aux étudiants de Strasbourg. Devant le Parlement et surtout à la Commission des Affaires extérieures, il est légitime et nécessaire que les parties les plus actuelles et les plus pressantes d’une question soient examinées, mais, ici, c’est sous un angle beaucoup moins aigu que je veux prendre les choses.

Nous vivons dans une époque solennelle et presque décisive où la géographie et l’histoire sont d’accord pour nous imposer une prise de contact avec le Rhin, et les circonstances nous obligent à faire un retour sur nous-mêmes et comme un examen de conscience national. Nous avons à vérifier et à vivifier la notion rhénane toujours sommeillante dans l’âme française. La tradition libérale de l’Université de France admet l’étude de toutes les questions, pourvu qu’on les aborde d’un esprit calme et réfléchi, sans humeur de polémique, et dès lors l’Université de Strasbourg n’était-elle pas magnifiquement indiquée pour que partissent de chez elle des considérations sur cette Rhénanie si voisine ? Ici, mieux qu’ailleurs, on comprendra