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dangers qui peuvent surgir, — les besoins économiques de sa population.

Dans l’archipel nippon la population s’entasse, surtout dans les îles du Sud et dans Nippon ; mais le Hokkaido (Yeso) est presque vide. Le Japonais n’émigre pas volontiers ; il préfère vivre misérablement sur ce sol natal qu’il aime et loin duquel il dépérit plutôt, que d’aller travailler sous d’autres cieux où le climat ne lui est pas favorable. Mais il y a une limite à la surpopulation. L’Empire nippon compte, en 1921, 77 millions de sujets dont 55 961000 pour le Japon ancien, 17 millions de Coréens, 3 600 000 à Formose, 100 000 à Sakhaline, plus les habitants des îles, les colonies éloignées, celles de Changhaï, de Singapore, des îles du Pacifique, enfin des États-Unis. L’accroissement par excédent des naissances va jusqu’à dépasser 14 pour 100. En Corée, la population indigène est dense, il y a peu de place pour l’émigrant japonais qui n’y vient pas volontiers, ne s’y sentant pas chez lui. Formose est vaste, à peine peuplée, mais le climat trop chaud déplaît au Nippon. Il faut donc nourrir sur place la population, lui procurer le riz et le poisson dont elle fait sa subsistance, et surtout la faire travailler. Sous l’impulsion de l’État et des banques, le Japon devient de plus en plus un pays industriel ; la fumée des usines obscurcit la limpidité du ciel.

Pendant la guerre, l’industrie et le commerce nippon ont largement profité de circonstances particulières et exceptionnelles ; le Japon devint un grand centre de production et de redistribution. À Singapore, les Japonais arrivèrent à éliminer presque complètement le commerce anglais. Aux Indes, ils n’étaient que 32 en 1911 dans toute la péninsule ; ils pullulèrent durant les hostilités ; leurs importations en 1918-1919 atteignirent 22 millions de livres sterling ; leurs exportations par mer, qui étaient de 30 000 tonnes en 1912-1913, atteignirent 530 000 en 1918-1919. Firmes, bateaux, banques, tout devint japonais : ce fut une véritable conquête économique qui ne pouvait manquer d’exercer une influence morale et politique et de précipiter l’évolution du mouvement autonomiste que, d’autre part, l’exemple et la propagande des bolchévistes encourageaient. Dans le Pacifique, aux îles de la Sonde, le Japon bénéficie d’un véritable monopole de fait. En Chine, le commerce du Japon triple de 1913 à 1919. L’Europe elle-même, où