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fidèles aient percé cette fenêtre pour pouvoir aisément plonger dans le coffre vide, dont le fond avait été consacré par le contact prolongé des restes sacrés, les objets de piété qu’ils voulaient sanctifier.

Ainsi, l’on aurait retrouvé, — mais dans quel misérable état ! — la basilique primitive de Sainte Reine, et l’on pourrait, aujourd’hui encore, voir et toucher le sarcophage où elle reposa durant quatre siècles.

La conclusion peut sembler à l’historien reposer encore sur des bases un peu fragiles ; la dévotion locale ne partage pas ces scrupules. Les pèlerins qui viennent en septembre à la fontaine miraculeuse ne manquent pas, parait-il, depuis que la fouille est achevée, de monter sur le plateau d’Alise et de prier auprès du tombeau au couvercle troué, qui a été laissé à la place où il gisait et dans l’état même où on l’a exhumé. Voilà une conséquence que la Société des sciences de Semur n’escomptait pas quand elle a résolu d’explorer le sol du mont Auxois.


* * *

Quelle que soit l’importance que garde aujourd’hui encore à Alise le culte de sainte Reine, ce n’est pourtant pas un problème d’hagiographie qui sollicite l’esprit du visiteur, sa promenade achevée.

Sur ce plateau, peuplé de si glorieux et de si poignants souvenirs, en présence des fonds de cabanes gauloises et des murs écroulés de la petite cité romaine qui les a remplacées, une autre question s’impose à la pensée : Que serait-il advenu de la Gaule, si la fortune des armes s’était prononcée pour Vercingétorix, si César avait été vaincu, au lieu de triompher ? aurions-nous gagné à ne pas être asservis par Rome ? la conquête romaine fut-elle pour les Gaulois un bien ou un mal ? On répond d’ordinaire sans hésiter : Ce fut un grand bien ; les vainqueurs apportèrent aux gens du pays les bienfaits d’une civilisation plus avancée, nourrie des traditions grecques, vivifiée par le souffle méditerranéen ; elle les soumit à une administration fortement constituée, à un régime perfectionné qui avait fait ses preuves et dont nous ressentons aujourd’hui encore les solides vertus. Les auteurs anciens, prosateurs et poètes, n’ont pas hésité à le proclamer, et non seulement les Romains de