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extrêmement favorables à cas jeux chromatiques de lumière auxquels M. Le Morvan attribue les apparences si « sensationnellement » interprétées par Pickering. C’est en somme quelque chose d’un peu analogue au rayon vert de la terre. Ce qui, — en dehors de l’absence optiquement constatée de vapeur d’eau et d’oxygène dans la lune, — tend à prouver que telle doit être la vérité, c’est qu’en quelques instants parfois, ces zones vertes s’étendent ou disparaissent sur des étendues énormes. Il n’est pas possible que de la végétation varie de cette manière.

Au surplus, le professeur Pickering assure avoir observé sur la lune des changements qu’il attribue sans hésiter à des blizzards, à des éruptions volcaniques, à des brumes et brouillards, à des nuages. Il semble bien que rien de tout cela ne soit réel.

Il y a bien longtemps que les observateurs de la lune y ont signalé des points brillants qui se déplacent, des zones plus ou moins floues, suivant les moments des sortes de marées ou de brumes. Seulement, quand on compare les photos ou les dessins de ces observateurs, on constate que les variations constatées par chacun ne concordent pas. En outre, des photos prises à quelques instants d’intervalle, manifestent des changements qui, s’ils étaient réels, correspondraient à des déplacements de la surface lunaire, à des vitesses de plusieurs kilomètres à la seconde. La vérité, c’est que toutes ces prétendues variations lunaires sont causées par l’agitation et les ondulations de l’atmosphère terrestre. Ce sont des apparences analogues à la scintillation. Il suffit d’avoir observé dans une bonne lunette l’image de la lune, tout ondulante et frémissante, pour en être persuadé.

En résumé, il semble bien que rien n’autorise à affirmer l’existence de vie organisée sur notre satellite, dont la surface est plus déserte et plus aride mille fois que celle du Sahara. L’Arioste déjà, nous a décrit dans la lune des vallons fleuris et peuplés de nymphes dansantes. Il faut hélas ! déchanter, à moins qu’il n’existe des nymphes anaérobies.


CHARLES NORDMANN.