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venues d’Allemagne par l’entremise du Grand-Duc de Hesse et du comte Eulenbourg…


Jeudi, 6 janvier.

D’après mon informateur L… qui a des accointances avec l’Okhrana, les chefs des divers groupes socialistes se sont réunis secrètement, il y a une quinzaine de jours, à Pétrograde comme ils ont déjà fait au mois de juillet dernier ; le conciliabule était présidé cette fois encore par le député « travailliste » Kérensky. L’objet principal de la réunion était d’examiner un programme d’action révolutionnaire que le « maximaliste » Lénine, réfugié en Suisse, a récemment développé devant le congrès socialiste international de Zimmerwald.

La délibération ouverte par Kérensky aurait abouti à un accord unanime sur les points suivants : 1o Les défaites ininterrompues de l’armée russe, le désordre et l’incurie des administrations publiques, les légendes terribles qui courent sur l’Impératrice, enfin les scandales de Raspoutine, ont achevé de discréditer le tsarisme dans l’esprit des masses. — 2o Le peuple est profondément écœuré de la guerre, dont il ne comprend plus ni le motif ni le but. Aussi, les réservistes des dépôts répugnent-ils chaque jour davantage à partir pour le front, de sorte que la valeur militaire de l’armée combattante décline rapidement. D’autre part, les difficultés économiques s’accumulent et s’aggravent sans cesse.— 3o Il est donc vraisemblable que, dans un avenir plus ou moins proche, la Russie sera obligée de répudier ses alliances et de faire séparément la paix. Tant pis pour les Alliés !… — 4o Mais, si cette paix est négociée par le Gouvernement impérial, ce sera évidemment une paix réactionnaire, une paix monarchique. Or, il faut, à tout prix, que ce soit une paix démocratique, une paix socialiste. Et Kérensky aurait clos le débat par cette conclusion pratique : « Aussitôt que nous verrons venir la crise finale de la guerre, nous devrons renverser le tsarisme, prendre nous-mêmes le pouvoir et installer une dictature socialiste. »


Vendredi, 7 janvier.

Combats très durs et très meurtriers dans la région de Czartorysk, qui avoisine les marais de Pinsk. Toutes les attaques russes sont brisées.