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et sois sûr de mes réponses très promptes et de mon zèle invariable.

« Ton bien dévoué,

« VILLEMAIN. »

Les semaines, puis les mois s’écoulent. Rien et toujours rien. La place espérée a été donnée à un autre. On ne répond même plus à ses lettres. Le découragement et la colère commencent à gagner l’historien.

« Trois mois passés dans l’attente et trois lettres sans réponse : voilà où j’en suis ; mets-toi un seul moment à ma place. J’avais espéré que l’inspection vacante ne serait pas donnée, elle vient de l’être et à qui ? Frange, miser, calamos! Puisque le précaire et l’éventuel continuent à peser sur moi, il faut que je songe sérieusement à mettre mes instants à profit. Adieu, les longues études ! Elles sont trop ingrates, elles m’ont fait perdre la vue et ne m’ont pas donné de quoi inspirer à mes amis un peu de résolution en ma faveur[1]. »

L’amitié de Villemain, sincère autant que nonchalante, s’émeut à cet appel de détresse. Il lâche de son mieux à réconforter le désespéré, plaide les circonstances atténuantes.


« Paris, 31 janvier 1833.

« Mon cher ami,

« Je te réponds tout de suite, ne pouvant faire mieux. Je veux au moins que tu ne doutes pas de mon zèle et de mes vœux. La bienveillance, l’estime de M. Guizot sont toujours les mêmes ; il souhaite vivement te faire une position meilleure, mais il ne l’a pas cru possible pour l’inspection, qui exige un service de voyage et d’activité. Ajoutons, mon cher ami, que sa longue indisposition, l’accablement d’affaires qui a suivi, et, depuis quelques jours, une maladie grave de Mme Guizot, tout cela le préoccupait et rendait plus difficile l’accomplissement d’une chose qui n’est pas dans le courant de chaque jour. Que cela ne te fâche pas. Mon cher ami, ne le crois ni oublié, ni méconnu ; mais je te dis les causes de retards. Je vais, au premier moment calme, lui proposer un arrangement qui ne te satisfera qu’à demi, qui est insuffisant, médiocre, mais qui

  1. Lettre à Villemain : Vesoul, 27 janvier 1833.