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les Français ont craint de débarquer à cause de la fière attitude des Hellènes.

« Le Roi est certainement débordé. Une proclamation royale pour calmer les esprits aurait cependant le plus heureux effet. Beaucoup d’opposants seraient enchantés de cette opportune occasion de retraite. Quant aux énergumènes, on se demande ce qui leur resterait comme point d’appui.

« 25 novembre. — La situation est toujours sérieuse. La nuit dernière, il y a eu convocation de réservistes, avec discours jusque dans les principaux cafés d’Athènes. Il y a eu réunion des généraux et officiers, sous la direction de Papoulas, qui paraît être énergique. Ce fut une sorte de reconstitution de la ligue militaire. On a projeté, paraît-il, de se replier sur Thèbes en cas de conflit avec les marins français, en laissant à une arrière-garde de réservistes le soin de piller et assommer les vénizélistes, de préférence les plus riches. On a même laissé entendre que les étrangers, quels qu’ils fussent, ne risquaient pas grand’chose.

« Ce qui est plus grave, c’est que nos adversaires paraissent être exactement au courant de nos moyens et de nos causes possibles d’infériorité. Gounaris a dit cette nuit : « L’amiral bluffe. Avec ce qu’il peut recevoir de Salonique et d’Argostoli, il n’aura pas plus de 3 500 marins à débarquer. Il n’osera pas faire le blocus à cause des neutres. D’ailleurs, les Alliés ne sont pas d’accord. D’ici au 1er décembre, les divergences de vues entre eux ne feront que croître. Enfin, l’Entente est déjà assez occupée ailleurs, et ne se soucie pas de créer un nouveau front en Grèce. Par conséquent, il faut refuser formellement toute cession d’armes. ».

« 26 novembre. — On fait peser sur les vénizélistes un régime de violente intimidation. Les arrestations arbitraires et les incidents sont fréquents. La nuit dernière, on a marqué à la peinture rouge un grand nombre de maisons vénizélistes, ainsi que celle où habite M. Ricaud, préposé à la direction du service des renseignements. Il y a là quelque chose de prématuré qui trahit la mise en scène.

« L’amiral Dartige s’est rendu chez le Roi et lui a demandé de protéger les personnes ainsi menacées contre des vexations injustifiées. Le Roi a réservé sa réponse, mais n’a pas caché qu’il était décidé à ne rien faire qui pût être interprété comme