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J’avais écrit à Ellen, bien entendu, ainsi qu’à Medora ; mais il paraît que cela ne suffit pas. Je dois envoyer une dépêche immédiatement, et lui dire qu’elle vienne seule.

May proposa :

— Voulez-vous que j’écrive le télégramme, ma tante ? S’il part tout de suite, Ellen pourra prendre le train de demain matin.

Elle prononça les deux syllabes « Ellen » d’une voix claire, comme si elle tapait sur deux clochettes d’argent.

— Comment faire ? dit Mrs Lovell Mingott. Jasper et le valet de pied sont tous les deux sortis pour porter des lettres et des télégrammes.

May se retourna vers son mari avec un sourire :

— Newland s’en chargera. Voulez-vous porter le télégramme, Newland ?

Archer acquiesça, et elle s’assit devant le bonheur-du-jour en palissandre pour écrire la dépêche. Elle la sécha soigneusement et la tendit à Archer.

— Quel dommage que vous, deviez justement vous croiser avec Ellen ! — Newland, ajouta-t-elle, en se tournant vers sa mère, est obligé d’aller à Washington pour une affaire de brevet qui vient devant la Cour Suprême.

Sur le point de sortir, Archer entendit sa belle-mère qui disait, s’adressant probablement à Mrs. Lovell Mingott :

— Pourquoi vous fait-elle appeler Ellen Olenska ? et la voix cristalline de May reprit : Peut-être veut-elle insister encore une fois pour qu’Ellen retourne auprès de son mari.

La porte de la maison se referma, et Archer se dirigea d’un pas pressé vers le bureau télégraphique.


XXVIII


— O — ol — ol — Comment ça s’écrit-il ? demanda la voix aigre de la jeune télégraphiste à qui Archer tendait la dépêche.

— Olenska — O — len — ska, répéta-t-il, reprenant le télégramme pour inscrire le nom en caractères plus lisibles au-dessus de la large écriture enfantine de May.

— C’est un nom bien exotique pour notre quartier, fit une voix inattendue, et Archer, se retournant, vit auprès de lui Lawrence Lefferts. Imperturbable, celui-ci tirait sa belle moustache, en affectant de ne pas regarder la dépêche.