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garantissent l’indépendance, mais où l’Angleterre exerce une influence prépondérante, tout le littoral oriental de la Mer Rouge et celui de l’Océan Indien, depuis Aden jusqu’à Singapour, en suivant les sinuosités du golfe Persique, est anglais ou sous le contrôle anglais. L’Océan Indien est, ou peu s’en faut, un lac britannique. Comment s’étonner qu’avec une persévérance toujours en éveil, le cabinet de Londres ait mis à profit toutes les vicissitudes de l’histoire contemporaine pour arriver à ses fins et mettre la main sur le canal de Suez ? La guerre, dès que la Turquie y fut entrée, lui apparut comme l’occasion souhaitée. Le 18 décembre 1914, le protectorat britannique sur l’Égypte est proclamé ; l’armée anglaise prépare la défense du canal ; en 1915, on se bat sur ses rives et peu s’en faut que les Turcs ne pénètrent en Égypte ; plus tard, l’offensive du général Allenby franchit le canal et pénètre en Palestine.

Le canal de Suez est régi, au point de vue du droit international, par la convention de Constantinople du 29 octobre 1888. Le canal « sera toujours libre et ouvert, en temps de guerre comme en temps de paix, à tout navire de commerce ou de guerre, sans distinction de pavillon, » dit l’article premier ; les articles suivants réglementent le passage des navires de guerre belligérants. Mais à qui appartient la police du canal ? D’après l’article 9, d’abord au Gouvernement égyptien qui « prendra, dans la limite de ses pouvoirs… les mesures nécessaires pour faire respecter l’exécution dudit traité ; » mais « dans le cas où le Gouvernement égyptien ne disposerait pas de moyens suffisants, il devra faire appel au Gouvernement impérial ottoman, lequel prendra les mesures nécessaires pour répondre à cet appel, en donnera avis aux autres Puissances signataires de la Déclaration de Londres, du 17 mars 1885, et au besoin se concertera avec elles à ce sujet. » De même est reconnu au Sultan de Constantinople comme au Khédive le droit de prendre des mesures « pour assurer par leurs propres forces la défense de l’Égypte et le maintien de l’ordre public. » Dans le cas où ils seraient obligés de prendre des mesures militaires à cet effet, deviendraient nuls les articles qui interdisent le séjour prolongé de navires de guerre dans le canal, le débarquement de troupes, de munitions, et qui donnent aux Puissances signataires de la Convention le droit de veiller à son exécution. Enfin, l’article 12 qui stipule qu’aucune Puissance « ne devra chercher