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la force; nous pourrions, nous saurions nous en servir, s’il le fallait, pour imposer le respect de tous les engagements souscrits... La France réclame son dû, tout son dû... Nous n’obtiendrons la sécurité que si l’Allemagne est désarmée. C’est pour notre pays une question vitale qui trace au gouvernement le premier et le plus sacré de ses devoirs. » Autant de phrases lapidaires, qui rappellent le discours de M. Raoul Péret et que se serait volontiers appropriées M. André Lefèvre lui-même, s’il eût été appelé à rédiger une déclaration ministérielle.

Je ne fais, du reste, aucun grief à M. Briand d’avoir composé un tableau un peu flou, lorsqu’il nous a indiqué la méthode qu’il comptait appliquer pour nous faire payer notre dû et pour obtenir le désarmement effectif de l’Allemagne. Avant d’avoir pris contact avec nos alliés, il était condamné à une grande réserve. Il a repoussé la théorie du forfait, que M. Pierre Forgeot avait reprise sous une forme assez imprévue et il a écarté, dans un mouvement d’indignation, l’idée d’amputer notre créance. Mais, comme toujours, on a discuté sur le forfait, sans prendre la peine de commencer par définir les mots, et je crains qu’il ne soit resté dans l’esprit de la Chambre quelque confusion sur ce grave sujet. Je n’aurai que trop souvent encore l’occasion de chercher à éclairer une route où tant d’intérêts opposés projettent des ombres épaisses. Pour l’instant, ce qui importe, sans doute, le plus, c’est que l’Allemagne ne puisse pas nous mystifier demain sur sa capacité de paiement. M. Briand a fait preuve, à cet égard, d’une très sage défiance. « Le coffre de l’État allemand s’est vidé, a-t-il dit, c’est entendu; mais les particuliers se sont enrichis et, quand on consulte les statistiques, quand on examine les conditions de travail de l’Allemagne, quand on constate les dividendes que de grandes firmes industrielles distribuent, on s’aperçoit que déjà la prospérité circule dans l’industrie allemande. »

Les renseignements que j’ai donnés ici, à plusieurs reprises, confirment cette observation de M. Briand et, tant pour l’opinion publique étrangère que pour la France elle-même, il n’est peut-être pas inutile de les compléter. J’ai montré qu’il était aisé de réduire les dépenses du budget allemand et d’en augmenter les recettes. Mais, à vrai dire, ce n’est pas le budget seul, ce n’est même pas la situation financière, considérée sous un aspect général, qui peut nous révéler complètement la capacité de paiement de l’Allemagne. Le Reich ne possède plus beaucoup de valeurs étrangères; il en a perdu une partie ; il en a écoulé d’autres frauduleusement; il a, en outre, livré