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et en revendiquer la gloire ; successeurs des religieux et des religieuses qui perpétuent des vertus jadis appelées de France ; modestes chercheurs et historiens, archéologues et mythographes, continuateurs des Walraff, des Wyttenbach, des Laven et des Auguste Becker.

Tout cela : des preuves vraies de notre généreuse activité et nos titres éternels sur le Rhin. L’Allemagne et le monde entier peuvent les vérifier, sans qu’il y ait à craindre que leur valeur soit ébranlée. Je souhaite ces enquêtes.

Et nous-mêmes, nous devons à l’infini méditer sur ce beau travail français, afin de bien saisir le sens profond de notre destinée rhénane. Les généreux résultats obtenus par nos pères doivent multiplier notre confiance et diriger notre action.

Mais ne nous illusionnons pas. Suffirait-il de restituer à ces survivances leur plénitude de conscience et de vie ? Fermement je réponds : non.

La Prusse ne bat pas en retraite. Son esprit n’a pas repassé les ponts avec ses armées. Que son désarroi ne nous trompe pas sur sa volonté ! Elle s’apprête à de nouvelles inventions brutales, hâtives et tyran niques. Depuis Berlin, elle s’efforce de tendre de nouveaux fils dans le domaine de la légende et de l’histoire, dans le domaine de la charité et de la vie économique. Que nous ménagent les nouveaux groupements dans lesquels elle tente de militariser et d’astreindre les libres dispositions de l’âme rhénane ? Je veux dire « l’Association générale de la Charité Allemande, » aujourd’hui à Fribourg en Brisgau et demain à Berlin ; je veux dire « l’Association générale de l’Industrie Allemande. » Que nous ménage l’effort de ses nouveaux mythographes, qui jettent en paquet sur le trésor légendaire du Rhin une multitude de récits de 1870, de la grande guerre et de notre occupation actuelle, pour recouvrir avec des images haineuses la paix et la lumière de nos souvenirs historiques communs ? Nous devons protéger l’esprit français contre des assauts inconnus de nos pères et adapter notre initiative à un siècle nouveau. Nous sommes arrivés, comme il y a cent ans, au moment de fournir une impulsion décisive.

La tâche que nous avons à remplir sur le Rhin est analogue, mais non semblable à celle que nos ancêtres y accomplirent. Il ne suffirait pas de ranimer le feu qui couve toujours sous la cendre : l’heure sonne d’opposer, en pleine lumière, sur