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bonne humeur. « Appelle Montholon. » Il passait dans le jardin en chantant quelque air d’anciens opéras qu’il avait retenus. Si le temps était mauvais, brumeux ou qu’il plût, il disait : « Maudit pays : il fait toujours mauvais ! » Après s’être fait passer ses vêtements, il se mettait à son bureau et écrivait ou bien s’allongeait sur son canapé et s’amusait à lire. Autrement, il allait se promener dans le salon et le parloir et regardait avec sa lunette par les petites ouvertures faites aux lames des persiennes. S’il avait fait appeler M. de Montholon, ils se promenaient ensemble jusqu’à l’heure du déjeuner. Le déjeuner fini, l’Empereur et M. de Montholon continuaient à se promener ensemble encore une heure à peu près, et ensuite l’Empereur rentrait dans son intérieur, se mettait sur son canapé ou à son bureau ou dans son lit. Assez souvent, quand il était au lit, il se faisait faire la lecture par Marchand et cette lecture durait quelquefois deux ou trois heures de suite. Soit que l’Empereur se fut reposé, soit qu’il eût travaillé, il faisait sa toilette vers les trois heures.

L’Empereur habillé, il sortait de son intérieur et faisait de nouveau appeler M. de Montholon, avec lequel il allait se promener dans les jardins, et, vers les quatre ou cinq heures, ils rentraient pour le diner. — Si le temps était humide, pluvieux, l’Empereur entrait au salon où M. de Montholon venait le joindre, et, la table de jeu d’échecs mise devant le canapé, ils faisaient ensemble quelques parties avant l’heure du dîner. Quelquefois ils se promenaient dans le salon et le parloir. L’heure du repas arrivé, on mettait le couvert sur un guéridon qui était au milieu du salon, si l’Empereur n’en ordonnait autrement. La première partie du diner était lestement faite ; mais souvent, lorsque le dessert était sur table, l’Empereur demandait tel ou tel livre, soit de vers, soit de prose, et renvoyait les deux personnes de service, le maître d’hôtel et le valet de chambre, en leur disant « Vous autres, allez diner. Dans une demi-heure, vous reviendrez me donner mon café. » La demi-heure écoulée, on le retrouvait quelquefois à table, quelquefois se promenant dans le parloir, ou dans les jardins, si le temps permettait qu’il mit les pieds dehors. Dès qu’il avait pris le café, il faisait appeler le Grand-Maréchal, et tous les trois se promenaient dans la grande allée du jardin, qui était la promenade habituelle de la soirée.