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Le fauteuil de l’Empereur était à quatre ou cinq pieds des marches de l’autel, une chaise devant lui. Les chaises du Grand-Maréchal, de Mme Bertrand et de M. de Montholon étaient placées aux deux côtés de l’Empereur et un peu en arrière. Les personnes de la maison se tenaient debout près des paravents. L’abbé Buonavita disait la messe, l’abbé Vignaly en petit rochet ou petit surplis et Napoléon Bertrand remplissaient les fonctions de servants. C’était Vignaly qui donnait l’évangile à baiser.

La chapelle n’était éclairée que par les bougies des candélabres et des chandeliers, la porte vitrée du jardin étant cachée par la tenture.

La messe était dite tous les dimanches. L’Empereur y assistait, à moins qu’il ne se trouvât indisposé et couché ; mais, dans ce cas-ci, on ouvrait la porte de sa chambre pour que les paroles du prêtre pussent arriver jusqu’à lui.

La messe terminée et l’Empereur passé dans le jardin ou dans le salon, la chapelle, en moins d’un quart d’heure, redevenait salle à manger, où tout était rétabli dans son premier état.

Un des premiers dimanches, l’Empereur, sortant de la messe, dit en souriant à ceux qui l’accompagnaient : « J’espère que le Saint-Père ne nous fera aucun reproche ; nous voilà redevenus chrétiens. S’il voyait notre chapelle, il nous accorderait des indulgences… »


L’Empereur, satisfait de la manière dont ses serviteurs avaient décoré la chapelle, voulut de nouveau exercer leur talent à décorer sa chambre à coucher et son cabinet. Ces deux pièces étaient si sales qu’il était dégoûté de les habiter. C’étaient les mêmes tentures que l’amiral Cockburn avait fait mettre lors de notre installation à Longwood ; elles étaient de nankin jaune avec bordures de papier à fleurs découpées. L’humidité et la poussière avaient rendu l’étoffe affreuse.

Quand l’Empereur se fut décidé à sortir de ses chambres, il déchira lui-même quelques morceaux de la tenture et avec aussi peu de difficulté qu’on déchire une étoffe brûlée. On se mit au travail. Pour commencer, nous collâmes du papier blanc sur les plafonds et ensuite sur les murs, pour cacher leur malpropreté. Cela fait, M. de Montholon fit acheter une grande quantité de mousseline rayée pour la chambre à coucher et de percale pour le cabinet. Dans ces deux pièces, au moyen de coulisses en haut