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abondantes, mis en action des forces motrices bien plus considérables et obtenu le kilowatt a un prix de revient bien moins élevé. D’après ces considérations et celles publiées par l’Annuaire de la Société Météorologique de France, un inspecteur général des lignes télégraphiques auquel avait été confié pendant plus de dix ans le contrôle des installations électro-motrices dans vingt-six départements, a montré dans le Journal de la Houille blanche (mars 1910) combien l’insuffisance du revêtement végétal avait retardé les installations électriques : « Le prix de revient est l’ultima ratio de l’industrie, dit M. Durègne, et la Houille blanche avait avant la guerre équipé 750 000 chevaux-vapeur sans attendre ni sa loi organique, ni des armes contre les barreurs de chutes. Si des montagnes mieux boisées avaient donné deux fois autant d’eau à ses installations et des prix de revient trois fois moindres au kilowatt, c’est 2 250 000 H P qu’elle eût équipés avec le même capital ; et en produisant une énergie trois fois moins chère, elle y eût affecté certainement un capital au moins triple. La France aurait équipé pendant l’avant-guerre au moins 6 750 000 H P, plus des deux tiers de ses forces motrices. La Houille blanche se serait ainsi substituée aux deux tiers de la Houille notre qu’elle peut remplacer, et notre Pays n’aurait pas manqué de charbon. »

Il n’eût pas non plus manqué de transports, car le développement des installations aurait permis, dès avant la guerre, d’actionner la plupart des voies ferrées par la traction électrique, employée seulement alors sur quelques embranchements du Midi et pour laquelle on fait aujourd’hui sur les autres réseaux des devis de plusieurs milliards ; les entraves apportées à la défense nationale par la pénurie du charbon et des transports en eussent été considérablement atténuées.


III. — CE QU’ONT COÛTÉ LES HÉCATOMBES FORESTIÈRES

On ne saura jamais le nombre de milliards qu’ont coûté à la France les deux saignées forestières du XVIIIe siècle et de la guerre 1914-1918. Il est incalculable, mais on peut cependant déterminer pour la première un chiffre qui, tout en étant notablement au-dessous de la réalité, renseignera sur son énormité.

Si la France avait conservé son boisement de 27 pour 100 et les forêts dont ses montagnes étaient revêtues avant la