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chevaux, devait transporter le corps de l’Empereur. Il stationnait dans la grande allée à l’extrémité de la pelouse.

Tout étant prêt, huit grenadiers, sans armes, suivis de plusieurs personnes, entrent dans le parloir et pénètrent dans la chapelle ardente ; ils prennent le cercueil et, avec beaucoup de peine et d’efforts, parviennent à le mettre sur leurs épaules ; ils fléchissent, pour ainsi dire, sous le poids de leur lourd fardeau. Ils se mettent en marche, passent par les mêmes pièces qu’ils ont déjà parcourues, descendent avec précaution les quelques marches de la véranda et gagnent le char sur lequel ils déposent leur précieuse charge, mais non sans beaucoup de difficulté. Le cercueil placé est recouvert d’un drap de velours bleu, sur lequel est étendu le manteau de Marengo. Sur celui-ci, en croix, l’épée et le fourreau.

Tous les Français avaient suivi le corps de l’Empereur. Le cortège se mit en marche dans l’ordre suivant. Les docteurs Antommarchi et Arnott sont en avant : ce dernier est en uniforme. A quelque distance suivent l’abbé Vignaly en chasuble et le fils du Grand-Maréchal, Henri Bertrand, portant le bénitier. Vient ensuite le char, dont les chevaux sont conduits par des postillons. Les quatre coins du drap sont tenus, devant, par Marchand et Napoléon Bertrand et, derrière, par le Grand-Maréchal et le général Montholon. Ces deux derniers, en uniforme, sont à cheval : le premier est au côté gauche. A droite et à gauche du char sont les huit grenadiers qui ont porté le cercueil. Derrière le char est le cheval de l’Empereur ; il est sellé et bridé et couvert d’un crêpe noir ou violet. Archambault, en livrée et à pied, le tient à la main. Immédiatement derrière le Grand-Maréchal et M. de Montholon, sur deux files, suivent les quelques serviteurs de l’Empereur, et derrière eux est une calèche attelée de deux chevaux conduits par un postillon, dans laquelle sont Mme Bertrand et Mlle Hortense sa fille. Après ces dames sont le gouverneur et l’amiral et tous les officiers d’état-major, parmi lesquels M. de Montchenu et le général Goffin. Viennent ensuite différentes personnes notables de l’île qui avaient été invitées ou s’étaient invitées elles-mêmes, les unes à pied, et les autres à cheval. Les militaires ont le crêpe au bras et les civils, habillés de noir, l’ont au chapeau.

Lorsque le convoi eut dépassé Guard-House, nous vîmes les troupes du 66e et du 20e, ainsi que la milice de l’ile, rangées en