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Pleins de la volupté brûlante du soleil !
Druse, au voile Hottant, à la longue paupière
Qui regardez, assise aux fontaines de pierre,
Le soir rose flamber à travers le Liban !
Femmes de Palestine et femmes d’Ispahan !
Bédouine aux lourds anneaux, de bleu sombre voilée
Qui vous dressez au bord des lacs de Galilée,
Comme une svelte amphore au milieu des reflets !

Mes sœurs du blond désert et des monts violets !

Dites-moi, dites-moi s’il est plus difficile
De porter jusqu’au seuil votre amphore fragile,
Sans verser l’eau profonde au chemin cahotant,
Ou de cacher le cœur sans répandre sa joie,
Lorsqu’elle monte en lui comme un flot qui tournoie,
Se soulève et bouillonne et déborde en chantant.


L’OMBRE DE LA SULAMITE


Je sors pour le chercher et je ne le trouve pas
Je l’appelle, il ne me répond pas…


I


J’ai vu la Douleur errer par le monde !

Elle chantait un chant tragique et suppliant,
Semblable au chant de ces pauvresses d’Orient
Qu’on sent confusément dans la sieste profonde
Au dehors sur le quai désert et flamboyant.

J’ai vu la Douleur errer par la ville !

Ses pieds divins traînaient dans le lit des ruisseaux,
Elle frappait aux seuils, mendiant un asile :
Partout on la chassait, comme un oiseau débile,
Par le bruit des baisers et le chant des berceaux.