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bouillon de muscles de poule, et rien n’est plus aisé que de l’entretenir en cultures successives qui se montrent très meurtrières pour les poules qui en ingèrent ou en reçoivent une trace sous la peau. Gardées à l’étuve à la température de 37°, ces cultures perdent peu à peu leur virulence sous l’action de l’air ; on s’en aperçoit à ce qu’une culture ancienne ne tue plus les poules auxquelles on l’inocule. Cette atténuation de la virulence se fait graduellement, de sorte qu’en puisant dans la culture, à diverses époques, on en retire d’abord un virus meurtrier, puis un virus ne faisant périr qu’une partie des poules inoculées et plus tard un virus qui ne donne plus qu’une maladie passagère. Les volailles qui ont subi cette maladie bénigne résistent à l’inoculation du virus virulent, elles ont l’immunité. Il s’agit maintenant de conserver, pour l’usage, le virus atténué au degré convenable et qui constitue un véritable vaccin. Pour cela, soustrayons-le au contact de l’air en l’enfermant dans des ampoules scellées à la lampe et gardées à la température ordinaire. Dans ces conditions, il reste vivant avec la virulence qu’il avait au moment où il fut enfermé. Il suffit donc de préparer, une fois, les virus atténués au degré voulu, et de les conserver en ampoules closes où l’on puisera la semence pour la cultiver lorsqu’il en sera besoin.

Cette première transformation d’un virus en vaccin, est une découverte mémorable : elle excita une vive émotion dans les milieux scientifiques ; l’atténuation de la bactéridie charbonneuse en souleva une plus grande encore, quand elle fut appliquée à la prévention du charbon.

Une culture de bactéridie charbonneuse exposée à l’étuve à 37°, aussi longtemps que l’on voudra, ne s’atténue pas, elle reste virulente parce que les spores, qui se forment dès le début, sont résistantes aux divers agents, l’air ne les modifie pas. Qu’adviendrait-il de la virulence, si la bactéridie était conservée à l’air sans former de spores ? Une expérience bien simple le montre. Ensemençons dans un matras contenant du bouillon une trace du sang d’un cobaye venant de mourir du charbon (la bactéridie ne donne jamais de spores dans le corps des animaux), puis plaçons ce matras dans une étuve dont la température est bien réglée à 42°5. La bactéridie croit sous forme de filaments privés de spores. Dans ces conditions, sous l’action de l’air et de la chaleur, elle perd chaque jour de sa