Page:Revue des Romans (1839).djvu/287

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Thébaïde où il se fait moine. Le supérieur, qui le voit plongé dans une tristesse profonde, lui en demande la cause ; il répond qu’il ne peut s’empêcher de regretter un enfant qu’il a laissé dans le monde ; le supérieur lui conseille de l’aller chercher et de l’amener au couvent. Célestine a deux ans ; son père l’amène au monastère, où elle est élevée sous les habits de moine jusqu’à seize ans, sans que ni elle ni personne se soit jamais douté de rien. Une fille d’auberge de la ville voisine devient amoureuse d’elle, n’en est pas écoutée, et, furieuse de sa froideur, lui attribue un enfant que lui a fait un soldat. La pauvre Célestine croit bonnement qu’elle en est le père ; elle est chassée du couvent, et se réfugie dans une famille honnête qui l’accueille avec joie. Le chef de la famille l’invite un jour à venir se baigner avec lui dans une petite rivière ; elle y consent, mais elle a peur de l’eau, et, dans son effroi, elle fait un mouvement qui laisse apercevoir au bon vieillard qu’elle n’est pas un garçon, et que conséquemment elle ne peut pas être le père de l’enfant qu’on lui a attribué. Son innocence est hautement reconnue, et elle épouse le fils de la maison, lequel, mieux dirigé par son instinct que ne l’avait été la fille d’auberge, commençait déjà à aimer le petit moine comme on doit aimer une jeune fille. — La nouvelle est agréablement narrée, et malgré son invraisemblance, plusieurs situations sont d’un intérêt fort touchant ; mais quelques efforts qu’ait faits l’auteur pour accommoder l’ingénuité de son style à celle de son héroïne, il y a dans cette histoire édifiante des détails propres à scandaliser les faibles.

MADEMOISELLE DE LA FAYETTE, ou le Siècle de Louis XIII, in-8, ou 2 vol. in-12, 1813. — On peut affirmer que parmi les femmes que la licence du trône a liées par des nœuds illégitimes à la personne des rois, Mlle  de la Fayette est celle dont le souvenir éloigne le plus toute idée de scandale et même d’inconvenance, et qui excite l’intérêt le plus vif ainsi que le plus pur. Mlle  de la Fayette n’eut point de faute à réparer, si ce n’est celle de s’être laissé aimer par Louis XIII, dans le noble dessein de se rendre maîtresse de cette âme paresseuse et faible, pour la fortifier et la relever, d’avoir enfin trop présumé de l’amour ; erreur de son esprit dont elle s’est punie héroïquement quand elle a senti que son cœur pouvait y prendre quelque part, en ensevelissant sa jeunesse et son éclatante beauté dans les ténèbres d’un cloître. Aussi, cette principale figure du tableau tracé par le pinceau de Mme  de Genlis se trouve-t-elle dans une harmonie non moins parfaite qu’agréable avec tous les imposants accessoires de religion, de dévouement et de vertu dont l’auteur a cru devoir l’entourer. — Ce roman offre une grande variété de peintures frappantes, de portraits vivement colorés, de scènes heureusement imaginées, de situations déve-