Page:Revue des Romans (1839).djvu/778

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les actes de rébellion que détermine la ligue des seigneurs contre le roi. Une des situations les plus touchantes est celle de Bathyle, emprisonnée dans Montlhéry ; Hugues l’aimait avant ce mariage forcé, et l’avait obtenue par séduction ; dans quelques mois elle va le rendre père. Le comte de Cressy revient à elle un moment, épris qu’il est de sa beauté ; mais sa maîtresse, qui tout en l’aimant rougit d’être unie à lui malgré lui, est blessée d’un retour de tendresse qui prouve seulement qu’elle est belle et que Luciane est sa rivale : c’est une existence manquée que l’amour a faite et qu’il doit défaire.

LE CHÂTEAU SAINT-ANGE, 2 vol. in-8, 1834. — Le sujet de ce roman est un des plus intéressants qu’offre l’histoire. On est à Rome à la fin du XVe siècle, sur cette terre souillée par les Borgia. Les principaux personnages du livre sont le pape Alexandre VI, le cardinal César, Lucrèce, Charles, roi de France, et le sultan Zizim. Tout le monde sait que ce prince, dépossédé du trône par son frère Bajazet II, se réfugia en Europe et y mourut. Les amours de Zizim sont la partie fabuleuse du roman ; ce qui en fait le fond historique, c’est la fin malheureuse du prince turc, ce sont les débordements de Lucrèce, c’est la lutte sanglante de César Borgia contre les grands, c’est enfin l’entrée de Charles VIII en Italie, comme pour y dévoiler tous les scandales et tous les forfaits de l’Église. Ce sujet est beau, mais l’exécution est loin de répondre à la grandeur du plan. Le roman est généralement froid et compassé ; on n’y remarque aucune de ces hautes pensées qui éclairent l’histoire, aucun de ces élans d’imagination et de sensibilité qui emportent la pensée et qui remuent le cœur.

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VIGNY (le comte Alfred de).


CINQ-MARS, ou une Conspiration sous Louis XIII, 4 vol. in-8, 1827. — M. de Vigny a voulu peindre dans ce roman, dont la conjuration de Cinq-Mars est le nœud et sa mort le dénoûment, la grande figure de Richelieu, ministre dur et despote, qui exerça la royauté dont Louis XIII fut le titulaire. Le portrait que l’auteur a fait de ce ministre, lâche assassin de ses ennemis, ayant des sicaires pour les victimes obscures et des juges vendus pour les têtes importantes, est vrai selon l’art et selon l’histoire. C’est bien là l’homme vu de près et pris sur le fait, tel qu’il a dû se révéler au bon sens historique et à l’imagination ; mais c’est surtout Richelieu dans ses jours de haine et de colère, quand il organise le meurtre ou l’espionnage avec le père Joseph et avec Laubardemont. Toutefois, en mettant surtout en saillie le mauvais