Page:Revue mensuelle d’économie politique - 1836 - T5.djvu/320

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J’en demande pardon à M. Say ; mais je ne comprends pas la différence qu’il établit entre l’appréciation et la mesure de la valeur. Ces deux mots indiquent pour moi la même chose, et il me semble que tout le monde doit être d’accord là-dessus.

Tout le monde sait que nous entendons par grandeur tout ce qui est susceptible de plus ou de moins, tout ce qui est conçu comme pouvant être augmenté ou diminué. Personne n’ignore, d’un autre côté, que, lorsque nous considérons les différentes grandeurs qui se présentent à nous dans l’univers, nous ne tardons pas à saisir, parmi elles, une différence caractéristique qui nous oblige à les diviser en deux classes. Il y a des grandeurs appréciables, et des grandeurs inappréciables. Les grandeurs appréciables sont celles qui peuvent se mesurer, c’est-à-dire se comparer entre elles d’une manière exacte et rigoureuse, telles que la durée, l’étendue, la chaleur, la vitesse, la pesanteur, etc. ; les grandeurs inappréciables, au contraire, sont celles qui ne peuvent pas se mesurer, c’est-à-dire se comparer entre elles d’une manière exacte et rigoureuse, telles que la santé, la beauté, l’intelligence, le courage, et mille autres qualités physiques et morales de la même espèce. Or, tout le monde sait encore que les grandeurs inappréciables ne font point l’objet des mathématiques, c’est-à-dire qu’elles ne donnent jamais lieu à des additions, à des soustractions, à des multiplications et à des divisions. Les mathématiques s’occupent exclusivement des grandeurs appréciables ou rigoureusement comparables entre elles. Ce sont celles-ci, et celles-ci seulement, qui peuvent donner lieu à des computations et