tum, in omnibus notitiis. Ce trait commun, c’est le je, ou le moi, dont nous avons toujours quelque conscience, chaque fois que s’exerce notre intelligence. On dira peut-être que cette conscience du moi semble s’évanouir quelquefois, et que nous pouvons penser à quelque objet sans penser en même temps à nous-même. Mais il n’est pas nécessaire, pour que la première proposition soit vraie, que la conscience du moi soit claire et distincte. Il suffit qu’elle ne soit pas tout à fait absente. L’habitude même de nous connaître, toutes les fois que nous percevons quelque chose, fait que nous ne remarquons plus cette idée du moi toujours mêlée à nos autres idées. Il faut remarquer aussi que le moi n’est pas connu par les sens, et que nous sommes naturellement attirés vers les objets sensibles. Nous en venons ainsi à nous oublier nous-mêmes, sans cesser pour cela de penser à nous, de regarder comme nôtres les impressions que nous éprouvons.
Cette première proposition serait insignifiante par elle-même ; mais tout le système en dépend. L’expérience la confirme plutôt qu’elle ne la contredit ; cependant elle vaut surtout comme vérité nécessaire, comme axiome, et la contre —proposition qui lui correspond est contradictoire. Si, pour constituer la connaissance, il suffit qu’il y ait quelque chose à connaître et une intelligence pour le connaître, et s’il n’est pas nécessaire que cette intelligence ait en même temps conscience d’elle-même, il faut supposer qu’une intelligence peut connaître sans le savoir, ce qui implique contradiction.
Ainsi l’objet ne peut être saisi par le sujet qu’autant que le sujet se saisit lui-même. Parmi les anciens, Pythagore seul paraît avoir compris cette vérité. Pour lui, il n’y a rien de concevable en soi ; c’est l’intelligence seule qui d’une chose fait une chose, lui donne l’unité, qui convertit l’inintelligible en intelligible ; mais on a mal interprété sa doctrine ; on a supposé qu’avant d’être connues les choses sont déjà soumises aux lois des nombres. Quelques philosophes allemands, Kant, Fichte, Hegel, ont entrevu le même principe ; aucun ne l’a clairement formulé.
Nous pouvons déterminer maintenant quel est l’objet de toute connaissance : « L’objet de toute connaissance, quel qu’il puisse « être, est toujours quelque chose de plus que ce que l’on prend « d’ordinaire pour l’objet ; il est toujours, il doit toujours être l’objet « avec l’addition du moi, l’objet plus le sujet. Le moi est une partie « essentielle de tout objet de. connaissance. » D’après cette seconde proposition, rigoureusement déduite de la première, ce que nous appelons naturellement l’objet de la connaissance, n’est plus qu’une partie de l’objet total que nous connaissons à chaque occasion. Dans