Page:Revue philosophique de la France et de l'étranger, II.djvu/180

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
170
REVUE PHILOSOPHIQUE

Dans un autre passage (3. 1, 1-2), un concours est ouvert par Janaka, roi des Videhas[1], à l’occasion d’un sacrifice qu’il accomplit, afin de savoir quel est le plus instruit (anûcânatama) parmi les brâhmanes des Kurus et des Pancâlas[2] réunis autour de lui. Mille vaches aux cornes de chacune desquelles sont suspendus dix pâdas d’or[3] seront la récompense du vainqueur. Aucun des brâhmanes n’ose proclamer la supériorité de son savoir ; seul, Yâjnavalkya n’hésite pas à se dire le meilleur, le plus instruit des brâhmanes (bhrahmishtha) et à s’emparer du prix offert par le roi. Les autres concurrents, qui s’étaient tus jusque-là, trouvent alors le sage présomptueux ; ils veulent savoir s’il est aussi savant qu’il le prétend, et neuf d’entre eux, dont une brâhmanî (une femme de caste brâhmanique), l’interrogent tour à tour sur différents sujets relatifs à la nature de Brahma et à ses rapports avec le monde sensible. Les réponses que leur fait Yâjnavalkya, forment tout le troisième livre de la Brihad-Âran.-Up.

Ailleurs encore (Brihad-Âran.-Up. 6. 2, 1-16), la théorie de la transmigration et de la délivrance est esquissée par Pravahana Jaibali, roi des Pancâlas, contemporain de Janaka, dans les circonstances suivantes. Le roi s’étant rencontré à l’assemblée des Pancâlas avec Çvetaketu Aruneya qui, d’après la Chândyoya-Upanishad, (6. 1, 2) était un jeune brâhmane fier, orgueilleux de sa science et rempli de présomption[4], lui demande si son père l’a instruit et, sur sa réponse affirmative, lui pose différentes questions relatives à la vie future et au passage des êtres dans d’autres conditions d’existence. Çvetaketu, obligé d’avouer son ignorance, revient trouver son père Uddâlaka, auquel il fait part de l’échec éprouvé par son amour-propre. Uddâlaka n’y peut rien, car il a enseigné à son fils tout ce qu’il savait lui-même ; aussi prend-il la résolution de se rendre auprès de Pravahana en observant les rites à l’usage des disciples approchant de leur précepteur, afin d’apprendre la science qu’il ignore et, arrivé en présence du roi, il le prie de lui indiquer lui-même la réponse à faire aux questions qu’il a posées à Çvetaketu.

    yâjñavalkyo’nyad vrttam upâharishyan. Maitreyîti hovâca yâjñavalkyah pravrajishyan va are’ham asmât sthânâd asmi hanta te’nayâ kâtyâyanyântam karavânîti. Sâ hovâca maitreyî yan me ma iyam bhagoh sarvâ prthivî vittena pûrnâ syât syâm nv aham tenâmrtâho neti neti hovâca yâjnavalkyo yathaivopakaranavatâm jîvitam tathaiva te jîvitam syâd amrtatvasya tu nâçâsti vitteneti. Sa hovâca maitreyî yenâham nâmrtâ syâm kim aham tena kuryâm yad eva bhagavân vettha tad eva me vibrûhîti.

  1. Peuple qui habitait au nord du Gange, dans la contrée appelée aujourd’hui Tirhut. La capitale des Videhas était Mithilâ.
  2. Noms de deux autres peuples très-puissants durant la période des Brâhmanas et qui résidaient dans la partie orientale de l’Inde.
  3. Sorte de poids équivalant à 11 grammes environ.
  4. Mahâmanânûcânamânî stabdhah.