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DELBŒUF. — LOGIQUE ALGORITHMIQUE 591

celui-ci : Donne-m'en 10, nous en aurons autant l'un que l'autre. Gomlâen ont-ils de noix chacun ?

L'arithmétique nous permettra-t-elle de résoudre ce problème? Non. Résoudre des problèmes n'est pas l'office de l'arithmétique. L'arithmétique fait des opérations, des additions, des multiplica- tions, etc., rien d'autre. D'ailleurs elle ne s'occupe ni de Pierre, ni de Paul, ni de leurs uoix, cela est tout-à-fait en dehors de son cadre. Mais celui à qui le problème est proposé se dira sans doute qu'on peut le résoudre au moyen de l'arithmétique en ce sens qu'il suffit de faire certaines opérations pour avoir la réponse. Mais quelles peuvent être ces opérations, c'est ce que Farithmétique ne peut lui apprendre.

Comprendre que le problème revient à renonciation d'un pro- blème d'arithmétique, c'est déjà un grand point : on peut alors cher- cher à le ramener à une forme générale. Soit proposé en effet cet autre problème :

Jacques a le double de l'âge de Laurent. Si Jacques était né 10 ans plus tard et Laurent 10 ans plus tôt, ils auraient tous deux le même âge. Quel âge ont-ils l'un et l'autre?

Au point de vue ordinaire, la question n'est pas la même que la précédente ; mais au point de vue arithmétique, elle est absolument identique. Pourquoi? parce que l'une et l'autre sont une application de cette troisième question qui en est pour ainsi dire la formule :

Deux nombres sont doubles l'un de l'autre ; si l'on retranche 10 du plus grand et que l'on ajoute 10 au plus petit, les résultats sont égaux. Quels sont ces deux nombres ?

Or celui qui ne parvient pas à ramener un problème à sa formule arithmétique a beau connaître l'arithmétique, il ne saura pas l'ap. pliquer ; c'est un manchot à qui on a remis un ciseau dont il est in- capable de se servir.

Voilà le problème ramené à une forme générale. Sommes-nous au bout? Non; il est encore indispensable que l'on devine par quel genre d'opérations on déterminera les inconnues. Nous sommes donc toujours en dehors de l'arithmétique, et cette science ne nous sera utile que du moment que nous aurons fait subir au problème à ré- soudre cette dernière transformation :

Déterminez deux nombres dont l'un soit égal à la somme de 10 et de 10, et dont l'autre soit égal au double de cette somme.

Mais avant d'en arriver là que de raisonnements un enfant ne doit- il pas faire! Je dis un enfant : ce n'est pas qu'un mathématicien exercé ne se livre aussi à la même argumentation ; seulement il la fait plus vite, d'une manière plus ou moins inconsciente et comme

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