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ribot. — psychologie de herbart

une influence avouée, et comment à tant d’égards sa psychologie n’a plus guère pourtant qu’un intérêt historique.

Il est donc nécessaire de dire brièvement quel est ce principe métaphysique sur lequel tout s’appuie. C’est l’unité de l’être. L’être, pour Herbart, « est absolument simple, sans pluralité, sans quantité, il n’est qu’un quale ». Il dit ailleurs : « L’être est une position absolue ; son concept exclut toute négation et toute relation. » Et, pour passer de ces considérations sur l’être en général à un être particulier : « L’âme, dit-il, est une substance simple, non-seulement sans partie, mais sans pluralité quelconque dans sa qualité[1] ». Sa qualité nous est inconnue ; mais son activité, comme celle de tout ce qui est réel, consiste à se conserver (Selbsterhaltung).

Si tout ce qui existe est absolument simple par nature et par définition, d’où vient donc la pluralité ? Elle ne vient que des rapports déterminés qui s’établissent entre un être et les autres êtres. Par suite de ces rapports réciproques, les êtres se trouvent en lutte ; et par suite de cette lutte, l’effort pour la conservation, le Selbsterhaltang, qui constitue essentiellement chacun d’eux, devient une représentation (Vorstellung). Telle est l’hypothèse de Herbart. Les représentations (ou, comme s’exprime la psychologie contemporaine, les états de conscience) ne sont donc « que les efforts que l’âme fait pour se conserver ». En d’autres termes, nos sensations, nos idées, nos souvenirs ; bref, tout ce qui constitue notre vie psychologique, n’existe pour nous que comme un effet de notre tendance à la conservation, qui, par son rapport aves les autres êtres, se détermine et se spécifie.

Tout ce début métaphysique est bien hasardé et rien de plus juste que cette remarque de Trendelenburg[2] : Le concept de l’être, chez Herbart, repose simplement sur la spéculation, non sur l’expérience.

Quoi qu’il en soit, admettons cette hypothèse et tenons la genèse des états de conscience pour expliquée. Nous avons maintenant la matière de la psychologie, les phénomènes qu’elle veut étudier : voyons comment Herbart va s’y prendre. Il est certain que, malgré ce goût marqué pour l’abstraction qui se traduit chez lui par l’abus de la métaphysique et des mathématiques, il montre parfois un sentiment vrai du fait réel, de son évolution et de ses variétés spécifiques.

  1. Lehrbuch zur Psychologie, 3e partie.
  2. Historische Beiträge zur Philosophie, tome 3.