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beurier. — philosophie de m. renouvier

toute l’importance qu’elle méritait, la préface de l’ouvrage que M. Ribot a publié sur la Psychologie anglaise contemporaine. Cette préface qui a surtout pour but de montrer les défauts de la psychologie purement descriptive, conclut à la condamnation des facultés de l’ame. M. Renouvier est, lui aussi, l’ennemi de la méthode descriptive, si chère aux Écossais ; il ne croit pas que décrire soit expliquer, mais il ne croit pas davantage que l’association, plus ou moins transformée, résolve tous les problèmes ; il est d’avis que l’étude des faits et de leurs rapports ne peut supprimer, ni encore moins remplacer l’analyse rationnelle des fonctions ou facultés de la spontanéité personnelle. Il va sans dire d’ailleurs que les facultés ne sauraient être pour lui des entités métaphysiques, qu’elles sont uniquement des lois, mais des lois irréductibles, ou, en d’autres termes, les catégories en action[1]. Dans cet intéressant débat, je me rangerais, volontiers du côté de M. Renouvier.

Je reviendrai plus loin sur les questions psychologiques.

VII

Idée générale d’une conception logique du monde.

Qu’il s’agisse des formes de la représentation ou de la représentation elle-même, étudiée et analysée dans ses deux éléments indissolubles, le représenté et le représentatif, tous les essais de réduction à l’unité qui viennent d’être exposés et réfutés sommairement reposent, d’après M. Renouvier, sur une vicieuse conception de la causalité. Pour les savants et pour les philosophes qui prétendent ne s’inspirer que des méthodes scientifiques, la causalité est ou devrait être la simple succession des phénomènes dont l’expérience constate aujourd’hui l’existence et les rapports, et que la même expérience pourrait ne plus offrir demain à la pensée. Cependant, les transformistes et les évolutionnistes, tout en subtilisant les forces primitives au point de les anéantir dans je ne sais quelle homogénéité incognoscible qui est posée comme donnée première, nous montrent ces forces, non pas se succédant ou se combinant, mais s’engendrant les unes les autres et engendrant toutes choses. Ce sont là des noumènes et non plus des phénomènes ; ce sont là des causes substantielles, des substances que la logique de l’unité, la logique de l’indistinction, la logique de l’illogisme réunit forcément en une

  1. Log. gén., II, 493 et la suite, jusqu’à la fin du volume.