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restrictions qui précèdent, une interprétation de la planimétrie non-euclidienne, on ne pouvait, dans l’espace tel que nous le concevons avec Euclide, obtenir rien de semblable pour la géométrie à trois dimensions de Lobatchefski.

En résumé, le mémoire de Beltrami appartient à la géométrie euclidienne, mais il touche à la géométrie imaginaire, car cette surface idéale, type des surfaces pseudosphériques, comme le plan est type des surfaces développables, et la sphère d’autres surfaces à courbure constante, cette surface qui ne peut être construite et qui n’est pas concevable dans l’espace d’Euclide, Beltrami raisonne sur elle comme si son existence était réelle ; il la représente même aux yeux sur un plan suivant une certaine loi de projection idéale, tout comme nous représentons la surface de la sphère sur les mappe-mondes ; et dans ces conditions, ses raisonnements qui ne font que traduire des Relations analytiques au moyen de symboles intuitifs, n’en sont pas moins à l’abri de tout reproche.

Dans le second travail que nous devons également examiner[1], Beltrami fait au contraire de la géométrie à dimensions, c’est-à-dire de l’algèbre, dans les applications de laquelle il abandonne subjectivement le concept euclidien, pour retrouver avec trois dimensions, les trois géométries à deux dimensions des trois classes de surfaces à courbure constante, c’est-à-dire la géométrie plane, la géométrie sphérique et la géométrie pseudosphérique.

J’insiste sur ce point qu’il n’y a là que de l’algèbre ; on part de trois groupes distincts de formules analytiques, applicables à la géométrie des surfaces réelles ; la distinction consiste dans la valeur d’un certain coefficient qu’on appelle courbure et qui peut être nul — plan et surfaces développables, — positif, — sphère et surfaces analogues, — ou négatif, — surfaces pseudosphériques. Il s’agit de constituer trois groupes correspondants dans lesquels figurent en général n dimensions au lieu de deux seulement. On sait d’avance que le groupe de ces formules, dans le cas de trois dimensions, qui sera applicable à notre espace concret, correspondra au groupe pour deux dimensions à courbure nulle. C’est donc simplement par métaphore qu’on dira que les deux autres groupes pour trois dimensions, par exemple, seront applicables à d’autres espaces à trois dimensions, à courbure constante, positive ou négative. C’est toujours par métaphore qu’on adoptera la même manière de parler pour autant de dimensions que l’on voudra. Il est donc bien clair que, dans les résultats que nous allons énoncer, il ne s’agit nulle-

  1. Théorie fondamentale des espaces de courbure constante.