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mantegazza. — transformation des forges psychiques

matière éternellement active, qui tantôt s’échauffe, tantôt s’électrise, tantôt est lumineuse, tantôt est magnétique, et les grands impondérables qui remuaient le monde sont devenus pour nous des travestissements de la matière. Quand le mouvement cesse, c’est qu’il est transformé en chaleur ; et la chaleur à son tour se change en mouvement dans la proportion où le veulent les formules mathématiques et inexorables de la transformation des forces. C’est le but encore lointain, mais c’est le but assuré de la science moderne d’inventer un appareil dans lequel un rayon de soleil pourra nous, donner à notre gré de la lumière, de la chaleur, de l’électricité et du magnétisme, rien qu’en tournant une manivelle ou en posant le doigt sur un ressort. Nous ne connaissons plus que la matière active, et pour nous la force est une, diverse seulement selon la direction des mouvements atomiques de la matière et selon la structure des nerfs qui sont destinés à en recueillir les diverses oscillations. Nous avons reconstruit en gros les quatre dieux impondérables de l’Olympe antique ; mais il est possible et même très-probable que la force ait d’autres travestissements, reconnaissables seulement pour des nerfs et des organismes qui existent dans d’autres planètes et dans d’autres systèmes stellaires.

Au-dessous des quatre grands dieux à qui nous avons donné les noms de chaleur, de lumière, d’électricité et de magnétisme, nous avons eu d’autres demi-dieux, que nous avons appelés force vitale, force nerveuse, pensée, etc. Ils ne sont eux aussi que des travestissements de la matière, des formes variées de l’unique énergie universelle qui peut provisoirement porter le nom de mouvement. Nous sommes tous d’accord pour appeler forces psychiques celles qui naissent dans l’intérieur du cerveau et des ganglions et qui courent le long des fils télégraphiques de nos nerfs. La seule différence entre les partisans de l’expérience et les idéalistes est que pour les premiers ces forces ne sont pas autre chose que le cerveau et les nerfs en action, tandis que, pour les seconds, le cerveau et les nerfs ne sont que les instruments nécessaires aux manifestations d’une énergie surnaturelle et en dehors des forces physiques connues. Voilà l’archée le plus tenace que la science expérimentale doit extirper en lui enjoignant de comparaître devant le tribunal de l’observation et de l’expérimentation.

Pour nous, les forces psychiques ne sont pas différentes des forces physiques ; elles ne le sont du moins que quant aux formes sous lesquelles elles se manifestent et quant aux organes spéciaux qui les produisent. Elles peuvent se réduire toutes au mouvement, à la résistance vaincue, à un poids déterminé que l’on soulève ; elles