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NOTES ET DISCUSSIONS




LES MATHÉMATIQUES & LA PSYCHOLOGIE




J’ai vu avec plaisir que M. Delbœuf, dont on connaît l’autorité en psychologie, a bien voulu faire quelque attention au petit travail que j’ai publié dans la Revue (1er mai 1877), sous ce titre : Une Illusion d’optique interne[1]. M. Delbœufme fait l’honneur de dire que, dans la loi proposée par moi sur le rapport de la durée apparente à la durée réelle, « je n’ai fait, sans m’en douter peut-être, qu’énoncer la même loi qui, d’après Fechner, règle les rapports de la sensation et de l’excitation. » Le savant auteur aurait pu dire certainement, au lieu de peut être, sans me faire le moindre tort, car jamais je n’aurais eu d’aussi hautes visées que de prétendre découvrir de mon côté une loi que je n’ai jamais bien pu comprendre. Quoi qu’il en soit, M. Delbœuf, tout en admettant, je crois, en général, la vérité de la loi que j’avais indiquée, montre que, prise à la rigueur, elle conduit à des conséquences absurdes ; et il se sert de ces conséquences pour montrer que la loi de Fechner « est inconsistante ».

Je n’ai pas à défendre la loi de Fechner, n’ayant pour cela aucune espèce de compétence ; je me contenterai de dire que je tirerais pour ma part une autre conséquence des observations ingénieuses de M. Delbœuf : c’est combien l’application des mathématiques à la psychologie est arbitraire et illusoire, lorsque, au lieu de voir dans l’usage des formules des manières vives de fixer les idées, on les prend comme des vérités réelles dont on a le droit de tirer toutes les conséquences rigoureuses : ce qui a lieu cependant si l’usage des mathématiques est à sa place. En disant par exemple que la durée

  1. Je dois aussi mentionner à cette occasion une note de M. Bernard, qui a paru dans la Revue du 1er août 1877 en réponse ou plutôt en complément de la mienne ; et je me félicite du développement heureux que mon travail a pu suggérer à l’auteur.