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delbœuf. — la loi psychophysique

deviendra pas deux ou trois fois plus grande, mais s’exprimera par une fonction logarithmique. Dans cet ordre d’idées, vu l’état actuel de la question, on peut discuter longtemps et sans aboutir à un résultat définitif, parce que l’expérience — qui est le seul juge sans appel — n’a pas le pouvoir de trancher le différend.

J’en dirai tout autant des formules empiriques telles qu’en imaginent Helmholtz, Aubert et Langer[1]. Je m’en réfère à cet égard à ce que j’en ai dit dans mon précédent article[2].

Enfin, cet article lui-même était consacré à l’exposition des arguments ingénieux et variés de Hering, le principal adversaire de la psychophysique. Je n’ai donc plus qu’à les rappeler. De son côté le philosophe de Leipzig réplique en général par les mêmes raisonnements que ceux que j’ai fait valoir, avec cette différence toutefois que très-souvent je donne raison à Hering, tandis que Fechner lui donne toujours tort. Il me sera ainsi loisible d’abréger considérablement cette partie si importante de la polémique. De cette façon l’attention du lecteur sera réservée pour celles des controverses dont il n’avait jusqu’à présent été fait qu’une mention sommaire.


III. — Fechner contre Hering, et les objections à, priori.


L’expérience établit que la sensation est une certaine fonction de l’excitation. Cette fonction une fois connue, on peut essayer de remonter à la cause de la sensation. C’est ainsi que les lois de Kepler ont conduit Newton à l’hypothèse de l’attraction universelle. Quelle que doive être la formule exacte qui relie ces deux termes, une chose est certaine, c’est que la sensation ne croît pas proportionnellement à l’excitation. Fechner s’est cru dès lors en droit d’introduire entre la cause physique agissante et l’effet psychique résultant un terme intermédiaire, la force psycho-physique, dont les rapports avec l’extérieur obéiraient au principe universel de la proportionnalité des effets aux causes, et dont les rapports avec l’intérieur seraient au contraire subordonnés à une certaine loi de progression.

Hering[3] et d’autres penseurs tels que Mach, Classen, Ueberhorst,

  1. Les deux premiers appuient leurs formules sur des expériences dont les résultats sont incompatibles avec l’équation de Fechner, et ils recherchent ensuite quelle espèce de correction elle devrait subir pour que cette incompatibilité fût écartée. Les modifications qu’ils proposent ont donc un but didactique et non théorique. Langer, au contraire, sans s’appuyer sur l’expérience, cherche à donner à la loi psychophysique une forme rationnelle.
  2. Revue phil., loc. cit., p. 263, à la fin de la note, et Étude psych., p. 23.
  3. Voir Revue phil., loc. cit., p. 229, 232, 233.