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par d’autres principes. Nous pouvons donc rechercher ces principes sans crainte d’être en contradiction avec la science, dont la neutralité nous est assurée.

La méthode à suivre pour cela, on l’a déjà vu, consiste à étendre à l’univers entier les déterminations essentielles du moi. Il y faut le concours de l’expérience externe qui fournit les faits à déchiffrer, les textes ; de l’expérience interne qui les interprète, et de la raison qui fait l’office de surveillant. L’emploi de cette méthode permet de tracer comme il suit les grandes lignes de la métaphysique de la nature :

Nous savons déjà, tous les êtres étant homogènes et, de plus, tout être ne pouvant exister qu’à la condition d’exister « pour soi », nous savons qu’il y a partout de l’interne et de l’externe. Mais quel est l’état interne qui correspond à ce fait externe, d’où paraissent dériver tous les phénomènes physiques et chimiques, c’est-à-dire au mouvement ? pour le savoir, demandons-nous ce qui se passe quand nous mettons notre corps en mouvement :

Il est aisé de constater que ce mouvement corporel est produit par un effort. Or cet effort suppose une résistance à vaincre. Réciproquement toute résistance est un effort. D’où il suit que, pour faire effort, il faut résister à quelque chose qui résiste. L’effort est donc une force de résistance, de réaction, de répulsion, le signe extérieur de cette force répulsive est l’impénétrabilité. Par là s’explique l’inertie des corps. — Mais l’effort, pour mouvoir notre corps, dérive lui-même en dernière analyse d’un désir, d’une appétition, comme dit Leibniz, Il en est donc de même de tous les êtres. La nature tout entière semble obéir à une sorte de désir vague, toujours inassouvi, ayant pour objet le suprême désirable, selon la conception d’Aristote. De là la mobilité incessante, de là aussi le rhythme des phénomènes naturels. L’appétition peut d’ailleurs se déduire encore de certains phénomènes, tels que les faits de cristallisation qui semblent manifester une « idée directrice », par suite l’existence d’une force appétitive. Cette appétition se traduit par le mouvement ; — dès lors, toutes les propriétés de la matière ont pour principes ces deux forces, la force répulsive et la force attractive.

Voici comment s’explique notamment la perception de l’étendue. Le point dynamique peut être conçu comme manifestant à travers l’espace sa double énergie répulsive et attractive. Or : 1° la force répulsive en s’exerçant formerait autour du point dynamique une sphère d’étendue de rayon variable, ce qui lui constituerait une espèce de corps. L’atome serait donc le point dynamique en tant que localisé dans l’étendue et se réservant à lui seul une portion définie d’espace pour y manifester son action ; 2° quant à la force attractive, elle rendrait compte de la juxtaposition des atomes et de la constitution des corps.

M. Dauriac croit également pouvoir expliquer par la force les autres propriétés du corps. Nous voici donc en plein dynamisme. Toutefois il