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condamner : si la lecture des Lettres morales ne nous console pas entièrement de nos heures perdues, elle nous offre le reflet d’ardeurs généreuses et l’écho de nobles sentiments.

Toutefois dans maint œil je vois chanter la flamme,
Et de maint cœur j’entends sourdre le battement.

C. H.

J. H. von Kirchmann : Katechismus der Philosophie (Catéchisme de la Philosophie)[1].

Ce livre est un résumé philosophique du réalisme destiné à créer un noyau de disciples dévoués à la propagande de cette doctrine.

La philosophie, selon Kirchamnn, est le résumé de toutes les autres sciences qu’elle domine. Son but est la recherche du vrai. Elle doit donc résoudre la question de l’existence de Dieu, indiquer les rapports de la divinité avec le monde, affirmer ou nier la vie future et nous éclairer sur ses conditions. Le philosophe devra avoir voyagé dans tous les pays, étudié les mœurs de toutes les nations, avoir vécu bien et mal, être doué d’une bonne santé, d’une mémoire vive, d’un jugement sain. L’auteur reconnaît bien l’impossibilité de réunir toutes ces circonstances, ce qui, selon lui, rend contradictoires les différents systèmes. Mais il encourage à s’élancer dans la voie de la recherche, malgré les difficultés.

Il divise son système en deux parties générales, savoir : la philosophie du savoir, et la philosophie de ce qui existe (Seiendes),

  1. Julius Kirchmann est fils d’un capitaine de cavalerie saxon. Elevé au gymnase de Mersebourg et à Leipzig, il fit son droit à Halle. Promu à plusieurs postes importants dans la carrière légale, il devint enfin Procureur civil à la cour criminelle à Berlin. Lorsqu’on 1848 le mouvement libéral éclata, il fut élu député et siégea avec le centre gauche. Ses opinions politiques déplurent au gouvernement qui le nomma Président du tribunal supérieur à Ratibor, ce qui le força de se démettre de ses fonctions de député. Mais il ne tarda pas de rentrer à Berlin comme représentant du département de Tilsitt. Il se rallia à son ancien parti, et fut rapporteur lors du refus du paiement des impôts. Plus tard il publia « Feuilles démocratiques ». Il provoqua l’hostilité du Ministre de la Justice par sa défense du comte Reichenbach, qui avait pris part au parlement révolutionnaire de Stuttgart, et s’attira une suspension de trois mois. Après que les trois mois furent écoulés, voyant que le Ministre lui gardait toujours rancune, il prit le parti de s’éloigner de la Prusse ; il demanda une permission de voyager pendant cinq ans, qu’on lui accorda. — Il alla à Dresde, s’acheta une propriété et s’occupa d’agriculture.

    Imbu d’idées réalistes, il les a développées dans la « Bibliothèque philosophique, » où il a comparé les principes de Bacon et de Descartes et leur rapport avec les deux systèmes opposés, c’est-à-dire l’idéalisme et le réalisme. C’est dans cette Bibliothèque qu’il a traduit et commenté « Les Recherches sur l’intelligence humaine, » de Hume. Enfin, il a soumis Spinoza et Schleiermacher à une critique minutieuse ; il a sondé les problèmes hardis de Darwin. Il a publié de plus plusieurs ouvrages à tendances réalistes : La philosophie du savoir ; sur l’Immoralité ; Esthétique sur une hase réaliste.