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une série de conférences de pédagogie, qui auront pour sanction en juin prochain des examens appropriés. Ajoutons que le plan suivi à Cambridge est exactement celui de M. Siciliani. M. Robert Hébert Quick, connu pour un livre intéressant, Essays on Educational reformers, s’est chargé, dans la première partie du cours, de l’histoire de l’éducation. M. James Ward expose la théorie, et M. J. G. Fitch la pratique de l’éducation. M. Siciliani ne pouvait pas désirer pour ses idées une confirmation plus éclatante : il regrettera seulement qu’elle lui vienne de l’Angleterre et non de l’Italie.

Louons aussi chez M. Siciliani la façon tout à fait pratique dont il a organisé un enseignement qui lui est cher. Il ne s’est pas contenté de parler devant des, élèves plus ou moins attentifs : il les a excités à travailler sous sa direction, à résoudre dans des devoirs écrits les problèmes de la pédagogie générale ou appliquée. « Les leçons ex cathedra, dit-il, sont comme des nuages. » Aussi a-t-il multiplié autour de lui les conférences, les exercices scolaires, les travaux personnels. Il suffit de parcourir la liste qu’il nous donne des dissertations de ses élèves pour se convaincre que, pendant ces trois dernières années, on a utilement et sérieusement travaillé autour de la chaire dé l’Université de Bologne, à l’exemple du maître. Voici quelques-uns des sujets qui ont été traités : La psychologie de l’enfance ; Les fondements psychologiques de la pédagogie ; Le matérialisme et le spiritualisme dans leurs rapports avec la science de l’éducation ; L’éducation religieuse dans les écoles primaires, etc., etc. Pour encourager et exciter davantage encore l’émulation qu’il a su faire naître, M. Siciliani demande au gouvernement de son pays l’institution d’un diplôme spécial d’études pédagogiques. Ayant attiré et groupé autour de lui un certain nombre de jeunes hommes et de jeunes filles, il voudrait obtenir pour eux un encouragement officiel, une autre récompense que celle qu’il leur a octroyée lui-même en publiant leurs noms dans une note de son livre.

Mais le professeur lui aussi mérite les encouragements de tous ceux qui s’intéressent à la science et à l’art de l’éducation, pour son zèle communicatif, pour l’ardeur et la générosité de ses idées. Nous sommes d’autant plus disposé à ne pas lui marchander l’expression de nos sympathies que lui-même, très bien informé de tout ce qui se fait à l’étranger, témoigne en plus d’un endroit de ses propres sympathies pour la France, pour la philosophie française. Sans doute nous pourrions nous permettre de reprendre quelque chose dans son style, un peu trop imagé, plus italien que philosophique et qui affecte les formes du journalisme plutôt que celles d’une sévère composition scientifique. Mais ces défauts sont bien rachetés par la sincérité et L’élan de la pensée, chez un écrivain qui ne risque pas d’être jamais atteint de cette maladie dont Tocqueville disait : « La plus grande maladie de l’âme, c’est le froid. »

G. Compayré.