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LES DÉSORDRES GÉNÉRAUX

DE LA MÉMOIRE



Les matériaux pour l’étude des maladies de la mémoire sont abondants. Ils se trouvent épars dans les livres de médecine, dans les traités de maladies mentales, dans les écrits de divers psychologues. On peut sans trop de peine les rassembler ; on a ainsi sous la main un recueil suffisant d’observations. Le difficile est de les classer, de les interpréter, d’en tirer quelques conclusions sur le mécanisme de la mémoire. À cet égard, les faits recueillis sont d’une valeur très inégale : les plus extraordinaires ne sont pas les plus instructifs ; les plus curieux ne sont pas les plus lumineux. Les médecins à qui nous les devons pour la plupart ne les ont guère décrits et étudier qu’en vue de leur art. Un désordre de la mémoire n’est pour eux qu’un symptôme ; ils le notent à ce titre ; ils s’en servent pour établir un diagnostic et un pronostic. De même pour la classification : ils se contentent de rattacher chaque cas d’amnésie à l’état morbide dont il est l’effet : ramollissement, hémorrhagie, commotion cérébrale, intoxication, etc., etc.

Pour nous, au contraire, les maladies de la mémoire doivent être étudiées en elles-mêmes, à titre d’états psychiques morbides qui peuvent nous faire mieux comprendre l’état sain. Quant à leur classification, nous en sommes réduits à la faire d’après les ressemblances et les différences. Nous n’en savons pas assez long pour essayer une classification naturelle, c’est-à-dire d’après les causes. Je dois donc déclarer, pour prévenir toute objection, que la classification qui va suivre n’a d’autre but que de mettre un peu d’ordre dans la masse confuse et hétérogène des faits, et que je ne me dissimule pas qu’à beaucoup d’égards elle est arbitraire.

Les désordres de la mémoire peuvent être limités à un seule catégorie de souvenirs et laisser le reste intact, en apparence au moins : ce sont les désordres partiels. D’autres, au contraire, affectent la mémoire tout entière sur toutes ses formes, coupent en deux ou