Page:Revue philosophique de la France et de l'étranger, X.djvu/241

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
231
analyses. — w. james. The association of ideas.

degré : tels sont ces personnages, souvent mis au théâtre, comme la nourrice de Juliette, dont l’intarissable bavardage ne fait grâce d’aucun détail, dont l’esprit, envahi par un flot d’images, n’a pas la force de résister au courant.

Maintenant il peut arriver que l’une des idées qui se succèdent, au lieu de se laisser emporter avec les autres, se détache du tout, se fixe un instant dans la conscience. Dès lors, au lieu de n’évoquer comme précédemment que les idées liées au tout dont elle fait partie, elle agira en quelque sorte pour son propre compte ; elle appellera ses propres associés, changera par conséquent le cours de la pensée. Ainsi apparaissent dans la pensée spontanée (car M. James réserve pour une autre étude la pensée réfléchie) des points de bifurcation. L’esprit prend une route nouvelle, et les choses se passent encore de la même manière, c’est-à-dire que le courant tantôt suit sans interruption le nouveau lit qu’il s’est tracé, tantôt se répand dans d’autres canaux ramifiés à l’infini. C’est ce que montre l’exemple si souvent cité de Hobbes. Dans la conversation où il est question de Charles Ier, l’idée du roi livré à ses ennemis s’isole du groupe dont elle fait partie et donne lieu, dans l’esprit de l’interlocuteur devenu étranger à la suite de l’entretien, à une série d’associations particulières. — Ce mode d’association peut être appelé association partielle ou mixte.

D’où vient que certaines idées s’isolent ainsi et font souche d’associations nouvelles ? De ce qu’elles présentent plus ou moins d’intérêt. Il y a là une influence de la sensibilité sur l’intelligence, une pénétration de ces deux fonctions qui avait échappé aux premiers psychologues anglais, et que M. Hodgson, le premier, a mise en lumière. C’est à coup sûr une des lois les plus importantes de l’association des idées.

Quand une idée, en raison de l’intérêt qu’elle présente, a conquis son indépendance, pouvons-nous indiquer laquelle de ses associées elle appellera de préférence ? M. Hodgson estime que c’est celle à laquelle elle a été le plus habituellement liée ; et il est bien vrai que l’habitude explique un grand nombre de cas. M. James croit cependant qu’il faut tenir compte d’autres caractères ; le fait qu’une idée est plus ou moins récente, qu’elle a été plus ou moins vive, qu’elle est plus ou moins d’accord avec notre humeur du moment, la rend plus ou moins apte à être rappelée. Un grand nombre d’exemples curieusement analysés, que nous sommes malheuresement obligés de passer sous silence dans ce compte rendu, viennent à l’appui de ces assertions. Même en tenant compte de toutes ces influences, il faut reconnaître que dans un grand nombre de cas nous sommes incapables d’expliquer la réapparition de certaines idées. L’état du cerveau, l’afflux du sang, le degré de la nutrition, mille causes inconnues, mais dont l’existence n’est pas douteuse, déterminent ces phénomènes que nous devons nous borner à constater, sans prétendre les expliquer.

Dans les associations partielles, nous venons de le voir, c’est une idée concrète qui se détache du tout et devient le point de départ d’une