Page:Revue philosophique de la France et de l'étranger, X.djvu/348

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
338
revue philosophique

plices, des charlatans qui exploitent la crédulité publique, des observateurs naïfs qui se laissent abuser par des jongleries, des filles hystériques qui trompent et qui simulent, sans autre motif que l’amour de la tromperie et de la simulation. Quelquefois, par condescendance, quelques-uns reconnaissent qu’il y a peut-être quelque chose de vrai au fond de tout cela ; mais ce vrai est si peu que ce n’est réellement pas la peine d’en parler.

Toutefois, le nombre des sceptiques va en diminuant tous les jours. Dans ces dernières années surtout, de très nombreux travaux ont paru, qui ont dû entraîner beaucoup de convictions. Mais, en fait de science, il ne s’agit pas de persuader quelques personnes : il faut persuader tout le monde. Aussi est-il nécessaire, avant d’étudier le somnambulisme, d’examiner scrupuleusement les preuves de sa réalité. Est-il une illusion ou une vérité ? faut-il prendre au sérieux les savants qui en ont parlé, ou se railler de leur extrême simplicité ?

La certitude scientifique consiste dans ceci : que le phénomène observé peut être, à volonté, reproduit par tous ceux qui procéderont de la même manière que le premier observateur. Ainsi, quand un chimiste annonce que le chlore, en passant dans de la. potasse, donne du chlorure et du chlorate de potassium, personne n’a besoin de reproduire cette expérience pour être sûr que c’est la vérité. Si celui qui a découvert cette réaction est tant soit peu expérimenté, on le croira sur parole, certain qu’en recommençant l’expérience on arrivera au même résultat. En mathématiques, en physique, et jusqu’à un certain point en physiologie, il en est de même ; et la preuve est faite par cela seulement qu’on sait pouvoir reproduire à volonté le même phénomène, en se plaçant dans des conditions identiques. Mais, pour le somnambulisme, il en est autrement. J’annonce, par exemple, qu’en faisant des passes pendant dix minutes sur le front et sur la tête d’un jeune homme de vingt-cinq ans, je l’ai mis en état de somnambulisme, et que j’ai pu constater chez lui de la contracture, de la catalepsie, des hallucinations, etc. Il ne s’ensuit pas, pour cela, qu’un autre expérimentateur, agissant de la même manière, sur un autre jeune homme, verra, de nouveau, les mêmes phénomènes se reproduire. Il est au contraire vraisemblable qu’il n’obtiendra pas les mêmes résultats ; car le somnambulisme survenant dès la première expérience chez un homme est un cas fort exceptionnel.

Il faut donc, pour démontrer la réalité de faits qui ne se reproduisent pas toutes les fois qu’on le désire, et qui sont, par eux-mêmes, assez surprenants, chercher des preuves qui entraîneront, sinon la certitude, au moins la conviction.

Nous pouvons avoir, soit une preuve absolue, pathognomonique,