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dessus, en l’éclairant vivement, en faisant vibrer un timbre à côté de lui, sans que ces excitations fassent sortir l’animal de sa stupeur. En liant rapidement avec un fil le bec d’un coq ou la patte d’une grenouille, on peut provoquer le même état de cataplexie.

Les excitations tactiles semblent être plus aptes que toutes les autres excitations à produire la cataplexie. Ainsi l’éclat de la lumière électrique, un bruit strident et soudain restent sans effet. À ces faits, bien démontrés par M. Preyer, je puis ajouter cette expérience que j’ai souvent répétée : une excitation électrique soudaine et violente (décharge d’une forte batterie de Leyde) portant sur la tête même de l’animal amène un mouvement brusque et total de tous les muscles du corps, mais on n’observe aucune cataplexie consécutive.

Chez les très jeunes sujets, il n’y a pas de cataplexie possible. Des cochons d’Inde nouveau-nés ou âgés de dix jours au plus ne peuvent jamais rester immobiles après avoir été pendant une minute brusquement saisis et maintenus. Mais les mêmes animaux, qui jusqu’à l’âge de dix jours ne présentaient aucun phénomène de cataplexie, finirent, lorsqu’ils avancèrent en âge, par en donner plus tard tous les signes, quand on les soumit à l’expérience.

M. Heubel[1] a fait sur les grenouilles des expériences analogues. Quoique les faits soient bien observés, les conclusions qu’il en tire ne me paraissent pas pouvoir être défendues.

J’ai souvent répété l’expérience de M. Heubel. Voici en quoi elle consiste. On prend une grenouille bien vigoureuse et bien agile, on la tient pendant deux minutes environ entre les doigts, le pouce sur le ventre et les quatre doigts sur le dos, en ne la serrant que juste ce qu’il faut pour l’empêcher de s’enfuir. Cependant les mouvements de la grenouille deviennent de plus en plus lents et paresseux ; c’est à peine si elle fait des efforts pour fuir ; finalement, quand on la place sur la table, elle reste le ventre en l’air, immobile, et cela pendant un quart d’heure, quelquefois une heure et même plus.

M. Heubel a pensé que cet état d’inertie et d’immobilité de l’animal était une sorte de sommeil, et que la cause même de ce sommeil était l’absence d’excitations extérieures. Suivant lui, quand aucune excitation périphérique ne vient ébranler le cerveau, le sommeil survient nécessairement, l’état de veille ne pouvant être conservé que par l’influence incessante des excitations périphériques qui retentissent sur le système nerveux central.

  1. Archives de Pftüger, t. XIV, p. 158 à 210 : L’état de veille du cerveau dépend des excitations extérieures.