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ch. richet. — du somnambulisme provoqué

causes du magnétisme. Ce n’est pas que les théories fassent défaut, mais elles sont toutes extrêmement insuffisantes.

Tout d’abord, il est évident que le même procédé appliqué à des personnes différentes ne peut pas réussir de la même manière. M. Preyer a observé de semblables différences individuelles chez les cochons d’Inde et les grenouilles. Que sera-ce donc quand il s’agira d’êtres humains ? On a remarqué avec raison que plus l’espèce est élevée dans la série, plus les individus sont dissemblants entre eux. Il y a plus de différences entre les grenouilles qu’entre les huîtres, entre les chiens qu’entre les grenouilles ; il y en a bien plus entre les hommes qu’entre les chiens. Cela est déjà vrai des organes de la vie de nutrition : mais combien plus vrai encore pour les organes de la vie de relation et surtout pour l’intelligence. De sorte que les expériences de somnambulisme portent sur l’organe le plus diversifié de l’être le plus complexe, chez qui les différences individuelles ont leur maximum de variabilité. Quelle difficulté pour l’expérimentation !

Quoi qu’il en soit, certaines conditions favorables peuvent être déterminées avec assez d’exactitude. Les femmes sont plus sensibles que les hommes. Relativement à l’âge, je suis porté à croire que les enfants peuvent être endormis ; mais je n’ai jamais fait d’expérience chez les très jeunes sujets, pour ne pas faire naître chez eux un état nerveux qui ne serait pas sans inconvénient. Je suis même convaincu qu’il ne faut pas magnétiser de jeunes enfants ; car, au moment où tous les organes sont en voie de développement, ils peuvent être facilement déviés dans leur direction, et on imprimerait alors à tout l’organisme une sorte de nervosisme funeste et presque pathologique. J’ai endormi des jeunes filles de dix-sept à dix-huit ans. Mais cet âge ne paraît pas être le plus favorable. Il semble que ce soit surtout de vingt-cinq à quarante ans qu’on puisse facilement être endormi. Quant aux vieillards, je croirais volontiers qu’ils sont assez rebelles au magnétisme. J’ai réussi à endormir une femme de soixante ans ; mais chez elle le sommeil n’a jamais été complet, et les symptômes ont été peu intéressants.

Les tempéraments nerveux sont, comme on le pensera sans peine, plus susceptibles que les autres. En général, les femmes petites, brunes, aux yeux noirs, aux cheveux noirs abondants, aux sourcils épais, sont des sujets très favorables. Cependant quelquefois on réussit très bien avec des femmes pâles et lymphatiques, et on échoue avec des femmes très nerveuses. En somme, les femmes délicates, nerveuses, languissantes, atteintes d’une maladie chronique ou relevant de maladie, sont certainement, plus que toutes les autres, aptes à subir l’influence du magnétisme.