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l. liard. — méthode et mathématique de descartes.

trouvera ici que la production des couleurs de l’arc-en-ciel ne dépend pas de la courbure des gouttes d’eau, ni de la grandeur de l’angle sous lequel elles apparaissent, ni de la réflexion des rayons lumineux, mais de la réfraction qu’ils subissent[1].

Ces exemples sont des plus simples, et ils sont de ceux où la vérité se dévoile par la seule vertu de l’analyse. Mais le plus souvent, sans parler ici de l’ordre de composition croissante suivant lequel, comme nous l’avons vu, doivent s’enchaîner les diverses propositions d’une science, dans la solution d’une question particulière, l’analyse n’est que la préparation de la synthèse. Soit à trouver les lois de la réfraction. La chose d’où il faut partir, la nature simple de laquelle dépend la réfraction des rayons lumineux, est la nature de la lumière. La lumière, et cette définition est un produit de l’analyse, « n’est autre chose, dans les corps nommés lumineux, qu’un certain mouvement ou une action fort prompte qui passe vers nos yeux par l’entremise de l’air et des autres corps transparents[2]. » Par là, l’esprit est conduit à concevoir que les rayons lumineux se comportent comme les corps en mouvement. S’ils rencontrent une surface impénétrable, ils rejaillissent, suivant un angle égal à l’angle d’incidence ; s’ils rencontrent au contraire un corps transparent qui les reçoit plus ou moins facilement que le milieu où ils se mouvaient d’abord, « ils s’y détournent en telle sorte qu’ils se trouvent toujours moins inclinés sur la superficie de ces corps, du côté où est celui qui les reçoit le plus aisément que du côté où est l’autre, et c’est justement à proportion de ce qu’il les reçoit plus aisément que ne fait l’autre[3]. »

À chaque degré de la réduction et de la composition, l’intuition fait voir le lien des propositions successives, et c’est grâce aux lumières dont elle éclaire continuement sa route que l’esprit peut s’avancer de la connaissance des propositions les plus simples à celle des plus composées et des plus obscures. Mais parfois elle fait défaut. L’esprit se trouve alors comme en présence d’une ligne d’ombre. Comment la franchira-t-il ? C’est ici que Descartes fait intervenir un procédé auxiliaire de la méthode, auquel il attachait assez d’importance pour l’avoir mentionné dans les règles du Discours : nous voulons parler de l’énumération, qu’ailleurs il appelle encore induction.

La quatrième règle du Discours a exercé la sagacité des inter-

  1. Cf. Météores, Disc. 8.
  2. Dioptriq., Disc. 1.
  3. Dioptriq., Disc. 2.