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quelque chose comme vingt et un ans qu’un très célèbre physiologiste n’a pas dédaigné de rééditer mon idée dans un grand discours académique, en l’offrant, bien entendu, comme de son cru. Et aujourd’hui, bien que feu M. Flourens compte encore des disciples fidèles dans le haut enseignement et à l’Académie des sciences ainsi qu’à l’Académie de médecine, l’hérésie de jadis est généralement professée par la jeune école physiologique. Quoi qu’il en soit, le principe ne peut plus être combattu que par des arguments surannés, puisés dans des considérations qui peuvent être respectables, mais qui sont extra-scientifiques.

Oui, cela a été surabondamment démontré par moi dès l’année 1855, l’organisme humain est un assemblage d’organismes élémentaires dont chacun possède tous les attributs fondamentaux manifestés par l’ensemble. J’ai appelé organe entier primaire cet élément organique intégrant, et sa part du travail vital est la fonction. Déterminer les lois générales de l’organe et de la fonction équivaut dès lors à donner la clef de l’entière mécanique vitale, et c’est résoudre d’un seul coup une infinité de problèmes physiologiques particuliers, les plus importants de tous, et ceux-là mêmes qu’on était convenu de regarder comme insolubles.

Et maintenant, quels sont les attributs divers nécessaires qui concourent à constituer l’organe et la fonction ?

L’organe entier primaire ou unité fondamentale intégrante de l’organisme est essentiellement formé, premièrement, d’un centre nerveux, lequel j’ai affirmé et démontré être le siège d’un principe psychique de même nature que celui qui occupe le centre cérébral et qu’on s’accorde à appeler l’âme, le moi ; — secondement, de conducteurs nerveux afférents et efférents ; — troisièmement, d’un organe-outil adapté au bout périphérique des conducteurs nerveux ; — enfin, quatrièmement, il faut compter, sinon comme pièce composante de l’organe, puisqu’il est en dehors de lui, du moins comme son complément nécessaire, et l’un des facteurs fonctionnels obligés, l’agent spécial de la fonction ou agent physiologique externe particulier qui doit concourir à l’exercice de la fonction, et qui lui est spécialement et exclusivement approprié par une disposition adéquate de l’organe-outil, que j’ai nommé, pour cette raison, organe différentiateur.

Quelles sont maintenant les conséquences lumineuses et les applications utiles par lesquelles se recommande cette vue de physiologie générale ? Forcé de me renfermer dans le cadre d’un article de revue, je vais me borner sur ce point à quelques aperçus très sommaires.

I. — Le corps humain cessant d’être regardé comme le royaume