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qui puisse servir de base immédiate à des déductions, mais d’un principe directeur d’hypothèses qui doivent rester constamment soumises au contrôle de l’expérience. Lorsqu’on affirmait que le ciel est parfait, que le cercle est la figure parfaite, et que par conséquent les astres se meuvent suivant des circonférences de cercle, on posait des principes dont on déduisait a priori une affirmation fausse. La recherche de l’unité n’a rien de commun avec les principes de cette espèce. C’est un principe purement formel qui ne fournit aucune loi, mais le caractère général de toutes les lois, qui ne produit directement aucune théorie, mais met la pensée sur la voie qui conduit aux théories vraies.

Dans cette vue juste de la méthode se réunissent les éléments vrais du rationalisme et de l’empirisme, à l’exclusion des erreurs propres à chacune de ces deux tendances. Suivons le principe de l’unité dans ces trois applications principales.

La recherche de l’unité, avons-nous dit, se manifeste d’abord dans l’induction, dont le caractère est de généraliser un fait observé. La généralisation se manifeste spontanément dans la formation de la parole, puisque sans la généralisation, il ne pourrait y avoir que des noms propres et aucun nom commun, ce qui rendrait impossible tout exercice un peu élevé de la pensée. L’induction réfléchie se présente d’abord sous la forme d’une conclusion du particulier au général fondée sur plusieurs observations. C’est ainsi que le géologue qui aura trouvé un certain nombre de fois des fossiles dans un terrain déterminé, s’attend à en trouver dans tous les terrains de même nature. Mais ce n’est là qu’une induction imparfaite, une simple analogie. L’induction strictement scientifique telle qu’elle s’emploie en physique particulièrement, ne conclut pas du particulier au général, mais saisit un fait général dans un cas particulier. Le physicien multiplie les expériences pour écarter les chances d’erreur ; mais, au fond, d’une simple expérience supposée parfaitement exacte, et dans un cas supposé simple, il n’hésiterait pas à tirer une conclusion générale. La fixité des classes et des lois est la majeure de tous ses raisonnements. L’idéal de la science serait d’atteindre par l’analyse les éléments primitifs des choses : l’atome premier, la loi initiale, et de partir de là pour la synthèse. En réalité, nous n’atteignons jamais des éléments primitifs, nous restons toujours dans le complexe, mais il suffit d’atteindre des éléments fixes pour que l’induction soit bonne. Lorsqu’on a atteint des éléments qui, bien que composés, sont véritablement fixes, on peut affirmer d’un individu ce qui est vrai de sa classe ; d’une classe, ce qui est vrai d’un individu envisagé dans ses éléments essentiels ;