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Straszewskila psychologie est-elle une science ?

de développement, enfin les recherches de pathologie mentale en rapport avec leurs causes physiologiques nous fournissent bon nombre d’exemples de la manière, dont l’expérience intérieure doit être soutenue et renforcée. Mais toutes ces recherches n’auraient pas été faites, si notre conscience intérieure ne nous renseignait sur l’existence des phénomènes psychiques, de même que les études astronomiques n’auraient pu avoir lieu si nous n’avions connaissance des corps célestes, et c’est à la vue que nous la devons. N’oublions pas cependant que ni la conscience, ni la vue ne sont les conditions de l’existence de l’objet de nos recherches, mais qu’elles sont les conditions de notre savoir par rapport à cet objet. L’objet par lui-même existerait sans elles, mais il n’existerait pas pour nous comme phénomène. Certains groupes de processus psychiques ont lieu chez les animaux aussi bien que chez les idiots, mais ni les uns ni les autres n’en savent rien.

Parmi les psychologues qui rejettent l’observation intérieure, il y en a qui pensent que l’objet étudié à l’aide de cette observation et le moyen de l’étudier ne font qu’une seule et même chose, et ils se croient autorisés par là à lui refuser toute valeur scientifique. Cette opinion est complètement erronée, car à l’aide de l’observation intérieure ce n’est pas l’observation elle-même que nous étudions, mais les processus psychiques qui ont eu lieu en nous et dont l’existence nous est connue. Nous en faisons l’objet de notre savoir et de nos pensées, nous réfléchissons sur leurs lois et sur leurs particularités, et de même que dans la physique l’objet des recherches, par exemple la lumière qu’on étudie, diffère de la pensée qui s’en occupe, de même ici le procès psychique que nous connaissons à l’aide de notre conscience diffère de la pensée qui est en train de l’examiner. C’est donc la plus grande erreur qu’un psychologue puisse commettre en fait de méthode que de rejeter l’observation intervenue, puisque c’est précisément elle, qui soutenue, par des moyens médiats et indirects, détermine le caractère spécial de la psychologie. — C’est uniquement à la conscience ou pour mieux dire à l’observation intérieure que la psychologie doit ses résultats les plus remarquables, tels que les lois de l’association et de la reproduction des processus psychiques ainsi que la loi psycho-physique.

L’observation occupe donc parmi les moyens de recherches dont dispose la psychologie une position centrale. C’est à elle que tout se réfère : d’un côté, l’expérience extérieure, ainsi que les résultats des sciences naturelles ; de l’autre, ceux des études comparées, des recherches ethnographiques, statistiques et de la Culturgeschichte viennent lui prêter leur appui.