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beaucoup de cas, de porter d’avance des jugements assez exacts sur leur caractère et leur future conduite. Le moyen d’étude que j’ai adopté et que je conseille à toutes les personnes à même de faire de telles observations est le suivant. Vous observez et notez avec le plus grand soin tout ce qui se rattache à un individu donné que vous voyez pour la première fois : physionomie, forme du crâne, démarche, dispositions héréditaires ou acquises que vous pouvez saisir, âge, antécédents, éducation, etc. Vous notez par écrit le résultat de vos observations, et portez, d’après votre expérience antérieure, votre pronostic sur le caractère et la conduite probable que vous supposez chez le sujet observé. L’individu étant suivi plusieurs années, vous confirmez par vos observations postérieures ou vous rectifiez, s’il y a lieu, les résultats de votre diagnostic, et appliquez les indications ainsi acquises aux cas nouveaux qui peuvent se présenter. On arrive ainsi à acquérir une habitude qui permet ensuite souvent, au premier coup d’œil, de voir sous le masque que se mettent la plupart des hommes, leur caractère réel, presque toujours différent de celui qu’ils se supposent ou de celui qu’ils veulent montrer, et ce que peut être leur conduite.

Ce serait entrer dans des développements qui m’entraîneraient beaucoup trop loin que de vouloir donner ici quelques indications sur les conclusions à tirer relativement au caractère de l’aspect extérieur, par exemple de la forme de la tête et de la physionomie. Il est peu de sujets aussi fertiles et qui aient été cependant moins explorés. Les recherches effectuées dans ces derniers temps par Duchenne de Boulogne et Darwin sur le mécanisme de la physionomie humaine en mouvement et sur l’expression des émotions constituent les seuls travaux scientifiques dont on puisse tirer des applications au diagnostic du caractère. On comprend facilement par exemple que lorsqu’on sait, suivant les observations du premier des auteurs que je viens de mentionner, que l’attention et la méditation s’accompagnent de la contraction du muscle frontal, la méchanceté habituelle et le désir de nuire de la contraction du muscle pyramidal, etc., on puisse, des plis de la peau indiquant la contraction habituelle de ces muscles, tirer des conclusions fort utiles sur les habitudes de l’individu observé.

Les auteurs que je viens de citer n’ont tiré aucune application de leurs recherches au diagnostic du caractère et il faut remonter à Lavater pour trouver des documents sur ce sujet. Malheureusement, malgré son talent incontestable d’observateur, Lavater manquait de méthode scientifique et il y a peu à tirer de ses observations. Il n’est pas douteux cependant qu’il existe certaines relations entre l’aspect