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2° La somme des trois angles d’un triangle reetiligne est égale à deux droits.

Le premier postulat n’a pas lieu (eu égard aux points à l’infini), pour l’espace sphérique de Beltrami. La somme des trois angles d’un triangle reetiligne est d’ailleurs supérieure à deux droits dans cet espace sphérique ; elle est inférieure dans le pseudosphérique.

Il est incontestable que la définition de l’espace, ainsi constituée, est de la plus haute valeur ; mais c’est peut-être dépasser la pensée de Helmholtz que de la regarder, avec M. Benno Erdmann, comme à jamais acquise à la science, et comme réglant désormais sans conteste l’ordre et la forme des axiomes à admettre en géométrie. Il suffit, par exemple, de faire remarquer que le concept de la ligne droite y est employé ; il faut donc logiquement que la définition de ce concept précède ces axiomes. Or il reste, en tout cas, très-soutenable que cette définition doit être donnée elle-même par un jugement synthétique, c’est-à-dire par un axiome spécial. Ainsi l’on dirait avec M. Hoüel : Lorsqu’on fixe deux points d’un corps solide et qu’on lui donne tous les mouvements possibles, on reconnaît qu’il y a dans ce corps une suite de points qui restent immobiles ; on dit qu’ils sont situés sur une ligne droite.

En somme, l’importance capitale des travaux d’Helmholtz me paraît jusqu’à présent consister surtout dans la démonstration irréfutable du fait que la notion essentiellement empirique du mouvement est nécessaire pour la constitution des axiomes de la géométrie.

Nous signalerons également dans le second chapitre de M. Benno Erdmann une réfutation complète de l’opinion de Zœllner qui a cherché à établir, par des considérations mécaniques et physiques, que notre espace possède en réalité une courbure positive très-petite, et qu’il est par conséquent fini[1].

Mais nous devons nous hâter d’aborder l’examen des conséquences philosophiques (Ch. III).

L’auteur distingue quatre problèmes (p. 89), relatifs à la psychologie, à la théorie delà connaissance, à la logique, enfin à la théorie générale des mathématiques.


Problème psychologique. Quelle est l’origine de la représentation de l’espace, et, par suite, quel est le lien qui l’unit aux autres représentations comme telles ? (pp. 90-112).

L’auteur se prononce nettement pour l’origine empirique ; toutefois il limite la portée de cette conclusion d’après l’exposé préliminaire d’une théorie de la représentation, dont nous ne pouvons mieux donner une idée que par la citation suivante (p. 90) :

« Toutes nos représentations intuitives correspondent aux choses aussi complètement qu’elles en sont absolument différentes dans tous leurs éléments. Chaque partie de ces représentations, leur matière

  1. Ueber die Natur der Cometen. Zœllner, 1872. Voir Revue philosophique, t. I, p. 405, et t. III, p. 221.