Page:Revue philosophique de la France et de l’étranger, tome I, 1876.djvu/161

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première partie fait connaître les solutions données aux questions générales de la science du beau ; la seconde, celles des questions particulières de cette même science ; la troisième, les théories sur l’art et les différents arts. Une pareille division qui rompt à la fois la marche historique et l’unité des grands systèmes est aussi contraire à l’histoire qu’à une exposition philosophique. Outre qu’elle condamne l’auteur à des redites, elle ne donne aucune idée de la suite et de l’enchaînement des doctrines, de leur rôle et de leur portée dans la science. Il semble qu’il n’ait eu en vue que de poser des questions aux auteurs, afin d’y intercaler ses propres idées, d’y mêler ses critiques, du reste fort discrètes et indulgentes, dont la conclusion se fait rarement entrevoir. Certes, ce travail a des mérites réels ; mais il ne répond nullement à son but et à son titre. Il n’y a pas là une véritable histoire de l’esthétique allemande. Le lecteur qui croit la trouver est fort désappointé, après l’avoir parcouru. Il se trouve avoir fait un voyage de fantaisie dans un pays inconnu, en compagnie d’un homme d’esprit, avoir traversé avec lui plusieurs fois, en repassant par les mêmes lieux, les montagnes, les fleuves et les plaines, sans reconnaître leur position, leur hauteur ou leur étendue. Il a entendu interroger des personnages importants sur des sujets intéressants, sans bien comprendre leurs réponses ni apprécier la portée de leurs discours. Surtout il lui serait impossible de dresser la carte du pays, d’en tracer les lignes principales et de s’y orienter. Mais cela prouve ce qui a été dit plus haut. Il n’y a qu’une science aussi jeune qui permette, dans son histoire, cette licence et ces écarts ; au point qu’un homme aussi distingué chargé de nous faire connaître son passé récent, croie pouvoir la traiter ainsi à sa guise et selon son caprice dans ses œuvres principales, se mettre à l’aise avec les plus grands penseurs, leur adresser des questions, noter leurs réponses, émettre ses vues propres, le tout sans donner aucune solution nouvelle ni laisser entrevoir ses principes.

3o L’histoire de l’esthétique comme science, de R. Zimmermann, outre qu’elle est complète et embrasse le développement de la science entière, est beaucoup plus en rapport avec son titre. Mais le point de vue trop systématique de l’auteur en gâte l’ensemble et toutes les parties. Entreprise dans le but de servir de préparation à un cours et de base à un nouveau système, elle manque tout à fait de l’impartialité relative nécessaire à l’historien qui veut avant tout faire connaître ce que d’autres comme lui seront appelés à juger. Lui, est un herbartiste déclaré. Son but est de prouver qu’en dehors de la philosophie de Herbart, il n’y a pas plus de salut pour cette science que pour toute autre. Ainsi son thème est fait d’avance. En