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Paul tannery.le nombre nuptial dans platon

rentes périodes dont les cycles sont plus ou moins rapidement parcourus, selon que la vie de ces êtres est de plus ou moins courte durée[1]. Quant à régler l’heur ou le malheur de vos naissances, si sages, si bien instruits que soient les chefs de votre État, ils n’y parviendront ni par l’expérience ni par le raisonnement ; cela est au-dessus d’eux ; ils feront donc naître des enfants quand il ne l’aurait pas fallu… »

C’est ici que commence la phrase obscure dont voici le texte[2] : ἔστι δὲ, θείῳ μὲν γεννητῷ, περίοδος ἥν ἀριθμὸς περιλαμβάνει τέλειος, ἀνθρωπείῳ δὲ, ἐν ᾧ πρώτῳ αὐξήσεις δυνάμεναι τε καὶ δυναστευόμεναι, τρεῖς ἀποστάσεις, τέτταρας δὲ ὅρους λαβούσαι, ὁμοιούντων τε καὶ ἀνομοιούντων καὶ αὐξόντων καὶ φθινόντων, πάντα προσήγορα καὶ ῥητὰ πρὸς ἄλληλα ἀπεφήναν· ὧν ἐπίτριτος πυθμὴν πεμπάδι συζυγεὶς, δύο ἁρμονίας παρέχεται, τρὶς αὐξηθεὶς, τὴν μὲν ἴσην ἰσάκις ἑκατὸν τοσαυτάκις, τὴν δὲ ἰσομήκη μὲν τῇ προμήκει δέ ἑκάστων μὲν ἀριθμῶν ἀπὸ διαμέτρων ῥητῶν πεμπάδος, δεομένων ἑνὸς ἑκάστων, ἀῤῥήτων δὲ δυεῖν, ἑκατὸν δὲ κύβων τριάδος.

« L’ensemble de ce nombre géométrique, continue Socrate, est le maître de la fortune et de l’infortune des naissances ; lors donc que, dans leur ignorance, vos Gardiens uniront en temps inopportun les épouses aux époux, il naîtra des enfants qui ne seront ni bien doués, ni d’un naturel heureux ; ils en choisiront bien les meilleurs pour leur succéder, mais ceux-là même n’en seront pas vraiment dignes. Gardiens à leur tour, ils commenceront par nous négliger ; ils n’estimeront plus à leur juste valeur, ni en premier lieu la musique, ni à son tour la gymnastique ; dès lors votre jeunesse ne sera plus soumise à la discipline des Muses. Les nouveaux chefs qui en sortiront, désormais tout à fait au-dessous du rôle des Gardiens, ne sauront plus discerner exactement les races d’Hésiode, les vôtres aussi, ces races d’or, d’argent, d’airain et de fer. Dès que le fer sera mêlé à l’argent, l’or à l’airain, voilà l’inégalité, la disproportion, le défaut d’harmonie qui, partout où on les rencontre, engendrent la guerre et la haine. Telle est l’origine du désordre, quelque part qu’il survienne. »

II. Nous ne nous proposons pas de commenter tout ce passage ;

  1. Ὅταν περιτροπαὶ ἑκάστοις κύκλων περιφορὰς ξυνάπτωσι, βραχυβίοις μὲν βραχυπόρους, ἐναντίοις δὲ ἐναντίας
  2. Nous adoptons le texte de Bekker, qu’on peut trouver dans les notes de la traduction de Cousin. Nous y faisons toutefois un léger changement, en substituant, d’accord avec d’anciennes leçons, ἑκάστων à ἑκατὸν après προμήκει. Le texte de Schneider, dans l’édition Didot, présente diverses variantes sur lesquelles nous n’insisterons pas. L’absence d’un interprétation littérale quelconque a privé jusqu’à présent la critique philologique d’un des éléments de discussion les plus sérieux.