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e. de hartmann. — schopenhauer et frauenstaedt.

gique repose sur une illusion trompeuse et sur une méconnaissance de la véritable source de cette harmonie par laquelle tout concept de finalité est éliminé. Si nous écartons la fausse interprétation de l’entendement, c’est-à-dire la manière dont nous nous représentons la cause finale, il ne reste pas, comme Frauenstaedt le suppose à tort, la finalité en soi, mais l’unité métaphysique de l’essence de la volonté, qui est en dehors de toute téléologie comme de toute causalité. De cette doctrine de Schopenhauer il n’y a donc rien à retenir ; elle doit avoir nécessairement le sort de son idéalisme subjectif.

Mais parallèlement à la précédente, nous trouvons dans Schopenhauer une autre conception réaliste de la téléologie qui trouve surtout son expression dans la considération de l’instinct et de l’activité organique avec leur finalité si parfaite. Frauenstaedt a raison de la conserver et il la développe dans sa 31e lettre. Il a également raison de rappeler à cette occasion la nécessité, exposée auparavant, d’une généralisation de la conscience et de la sensibilité, et il présente celle-ci comme un complément indispensable pour l’intelligence de la vie instinctive dans les animaux et les plantes. Mais il se trompe en croyant que cette sensibilité confuse, certainement nécessaire pour la transmission des motifs et des excitations, peut offrir une compensation de la représentation inconsciente créatrice et de son anticipation de l’avenir..D’un autre côté il dit lui-même dans sa critique de la première édition de ma Philosophie de l’inconscient : « Schopenhauer place même la sagesse inconsciente de la nature, qui se manifeste dans l’intelligente formation des organismes, dans les instincts artistiques et autres, dans le choix du sexe, beaucoup au-dessus de toute la sagesse consciente des hommes. Le savoir inconscient de la volonté de la nature est à ses yeux bien supérieur à tout le.savoir conscient des esprits individuels des hommes. Nous voyons déjà, par la grande importance attribuée par Schopenhauer à l’intuition, à la divination, à la clairvoyance comme à un savoir franchissant les limites du temps et de l’espace (que l’on compare les traités sur le but apparent dans la destinée de l’individu ; et les visions avec ce qui s’y rattache dans le premier volume des Parerga), nous, voyons, dis-je, par là qu’il a non-seulement connu la représentation inconsciente, mais qu’il en a reconnu et fait ressortir l’importance plus que tous les autres philosophes avant lui. Et dans son traité : Arthur Schopenhauer et ses adversaires, Frauenstaedt dit : Si Schopenhauer, tout en reconnaissant des lois et un but dans les actes de la volonté de la nature, refuse à cette dernière la connaissance, il faut, pour se rendre bien compte de cette opinion, voir quelles en sont les raisons. Par connaissance, Schopenhauer entend cette fonc-