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analyses. — noiré. La Pensée monistique.

de propositions très-simples. Le monde se compose d’atomes individuels ou monades, toutes semblables, douées de deux propriétés, l’une interne, la volonté ou le sentiment, l’autre externe, le mouvement. La forme du mouvement est l’espace, la forme du sentiment est le temps. Le mouvement est un principe de changement, le sentiment est un principe de durée. Ils sont, l’un et l’autre, les agents de l’évolution et de la persistance. Ces prémisses posées, l’univers tout entier se déduit depuis la simplicité des corps élémentaires jusqu’aux transformations les plus complexes de l’homme et des sociétés. Agrégat de forces semblables qui toutes se meuvent et sentent, le monde, sur le théâtre de l’espace et de la durée, obéit à son éternel et infini progrès.

Tel est le monisme : il se présente comme l’accord de plusieurs systèmes, et par ce trait, il ressemble à plus d’une philosophie dont ce siècle a vu l’avènement. Peut-être même n’exclut-il pas, autant qu’il semble le croire, la métaphysique de Schelling et de Hegel. Mais il cherche des alliances qui aient plus de faveur : et dans le rang intermédiaire qu’il occupe entre la philosophie proprement dite et la science, il ne se recommande guère que des génies mixtes eux-mêmes, tels que Spinoza, Leibniz et Kant. Lui aussi, en dernière analyse, il repose sur la notion de la force, qu’il rapproche le plus possible du vouloir et de l’esprit. C’est le problème où se rencontrent aujourd’hui la science et la philosophie : il est douteux que le monisme se figure l’avoir déjà résolu.

A. Gérard.