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espinas. — le sens de la couleur

ment visitées par les insectes, seraient les plus sujettes à être croisées entre elles, ce qui à la longue leur assurerait l’avantage et les transformerait en une variété locale. Les fleurs aussi dont les étamines et les pistils seraient mieux en rapport avec la « taille et les habitudes de l’insecte spécial qui les visite plus particulièrement, seraient, par leurs dispositions favorables au transport du pollen, également avantagées. Nous aurions pu aussi prendre les cas des insectes qui s’introduisent dans les fleurs pour en recueillir le pollen, dont la soustraction semble être une perte pour la plante, puisqu’il ne sert qu’à sa fécondation. Cependant le transport, d’abord occasionnel, ensuite habituel, par les insectes, d’un peu de pollen d’une fleur à l’autre, serait encore un avantage pour la plante, à cause des croisements qui en résultent — quand bien même les neuf dixièmes du pollen seraient détruits — et auraient pour conséquence une sélection des individus ayant les anthères plus développées et produisant plus de pollen[1]. » Dans un autre endroit du même ouvrage, Darwin mentionne les oiseaux comme agents de dissémination des graines. Quelques-unes ne sont pas digérées, dit-il ; ce sont les graines dures des fruits ; quelques autres peuvent être dispersées par un oiseau de proie qui se saisit de l’oiseau granivore avant que les graines n’aient passé du jabot au gésier et ne soient par conséquent altérées par la digestion, etc.[2].

Quelques années plus tard, Spencer reprenait dans sa Biologie la question posée par Darwin du rôle des insectes dans la fécondation des plantes. Celui-ci ne les conquérait que comme les auxiliaires de la fécondation croissée et par suite de la séparation progressive des sexes : il prenait comme donnés la fleur et l’insecte, hautement différenciés déjà. Spencer remonte au delà. « Sans doute, dit-il, nous ne pouvons pas recourir ici à l’exemple d’insectes à habitudes aussi spécialisées que les abeilles et les papillons ; car ces habitudes spécialisées supposent la préexistence de la différence qu’il s’agit d’expliquer. Mais il y a une action due aux insectes, d’un genre plus général, dont il nous est bien permis de faire entrer l’influence en ligne de compte. Il y a de nombreux diptères et coléoptères qui voyaient d’une plante à l’autre en quête de pâture. Il est légitime d’admettre qu’ils fréquentent de préférence les parties où ils en trouvent la plus grande quantité, et celle qui est le plus de leur goût, surtout quand, en même temps qu’ils trouvent leur pâture, ils se mettent à l’abri. Or les extrémités des axes, formées de feuilles

  1. Darwin, Origine des espèces, trad. Moulinié. Reinwald, 1873, p. 99. Suit la constatation expérimentale du transport du pollen par les abeilles.
  2. Voir même ouvrage, p. 389 et 413.