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ANALYSES. — t. mamiani.La religione dell’avvenire.

croyant, chez qui l’intelligence seule est athée, retrouve par le cœur tout un monde idéal que, sans le cœur, l’esprit rejetterait comme illusoire.

Enfin la foi en l’immortalité apparaît comme impliquée dans ce sentiment religieux, et la science ne prouve rien contre elle.

Le problème de l’immortalité est lié à celui de la spiritualité, qui n’est point encore résolu, et qui ne le sera jamais, par la physiologie. M. Mamiani n’éprouve pas le besoin de donner sur ce point d’autre démonstration que celle-ci : « La meilleure preuve que l’âme est spirituelle et immortelle est dans le libre arbitre invariablement reconnu par la voix solennelle, incessante, universelle, qui éclate en tout lieu, civilisé ou barbare, aujourd’hui comme autrefois, pour proclamer l’âme humaine responsable de ses actes. Le libre arbitre implique de notre part une certaine participation à la dignité de cause première et d’autonomie absolue qui suffirait à elle seule pour prouver notre immortalité. Ainsi en jugeait Platon avec une profonde sagesse[1]. » Je ne sais si l’argument est irréfutable, mais à coup sûr c’est là une belle espérance et une noble foi.

D’ailleurs qui dit exister ne dit pas vivre. L’âme, une fois privée du corps qu’elle informe, reste à l’état de pure puissance, jusqu’à ce qu’elle entre dans une autre combinaison à laquelle elle communiquera le mouvement et la vie. M. Mamiani s’en tient sur ce point à la solution des Padouans du xvie siècle, qui regardaient l’âme comme mortelle quant à son acte et comme immortelle quant à sa substance.

Voilà les quatre grands postulats de la religion, et l’on voit que, suivant l’auteur, aucun d’eux ne se trouve infirmé par la science en l’état actuel de nos connaissances. Mais le sentiment religieux a un ennemi plus subtil et plus dangereux peut-être dans la critique, dont il lui faut maintenant subir le contrôle.

II. — Critique et religion.

La religion naturelle, dont nous venons d’esquisser les principaux traits, a donc droit à l’existence, nous l’avons dit et prouvé. Mais nous sommes arrêtés au début par un scrupule : Mérite-t-elle bien le nom de religion ? N’est-elle pas trop abstraite, trop vide même, pour satisfaire au besoin moral auquel elle prétend répondre ? Le peuple ne sent et ne comprend rien qu’à travers dès symboles.

Aussi n’est-ce pas immédiatement au peuple que l’auteur s’adresse, mais aux esprits cultivés, aux âmes élevées qui ont abandonné les dogmes de l’orthodoxie, mais ne peuvent se résoudre à rester sans une foi. On affirme trop légèrement d’habitude que la foi est un phénomène complexe, une résultante dont les composantes nécessaires sont, d’une

  1. La religione dell'avvenire, p. 117.